Les accusations portées contre lui s’appuient sur ses chroniques publiées dans Deutsche Welle Arabic et sur son dernier roman J’ai couru vers le Nil (Actes sud, 2018) qui raconte les événements de la révolution de 2011, "parce qu’il dénonce les exactions du régime et de l’armée commises pendant la révolution de 2011" explique l'écrivain dans une interview parue hier dans Les Nouveaux Dissidents. "On me poursuit parce que je témoigne de ce que j'ai vu et de ce que j'ai vécu, on me poursuit à cause de mes textes, ce qui est contraire à toutes les conventions internationales, à l’article 65 de la Constitution égyptienne qui garantit la liberté de pensée et d’opinion à tous les citoyens, ou à l’article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme dont l’Égypte est signataire" affirme-t-il.
Un libraire condamné à cinq ans de prison
Il rappelle aussi qu'"Une procédure judiciaire via un tribunal militaire peut autoriser qu’on saisisse les biens, qu’on bloque les comptes bancaires, etc." Il ajoute: "Je suis inquiet pour ma famille, pour mes proches qui sont en Égypte. On peut imaginer des scénarios effrayants, qu’ils soient enlevés, qu’ils disparaissent. C’est arrivé à de mes amis, des amis révolutionnaires dont les proches ont été kidnappés ou qui, du jour au lendemain, ont disparu. Ce régime est terrifiant. Récemment, un libraire a été condamné à cinq ans de prison parce qu’il avait vendu un (seul !) exemplaire d’un livre interdit par la censure".
Chroniqueur engagé, il défend ardemment les valeurs de la démocratie dans de nombreux articles qui ont paru dans la presse égyptienne et internationale. Depuis que le marchal al-Sissi est devenu président de la République, il souligne qu'il lui est interdit d'écrire dans la presse égyptienne. Par ailleurs, Alaa El Aswany, qui vit aujourd’hui aux États-Unis où il enseigne la littérature, est l’un des membres fondateurs du mouvement d’opposition « Kifaya » (Ça suffit). En 2011, il prend une part active au Printemps arabe et participe au mouvement de la place Tahrir, cette expérience lui inspire son roman J’ai couru vers le Nil.
Dans un entretien à France Culture, il avait précisé à propos de ce roman qu'il avait été "interdit en Égypte" et "interdit malheureusement dans tous les pays arabes sauf dans trois pays : la Tunisie, le Maroc et le Liban. Le livre a été publié au Liban. Le problème c’est que le régime en Égypte ne peut pas tolérer un roman pareil parce que c’est presque un miroir, dans lequel on voit la dictature." Alaa El Aswany a reçu le Prix Transfuge du meilleur roman arabe pour J'ai couru vers le Nil, vendu en France à près de 30000 exemplaires.
L'auteur participera à une rencontre le 27 avril à la Grande Halle de La Vilette, avec Cyril Dion, Nicolas Mathieu et Jeanne Cherhal sur le thème "Changer d'histoires pour changer l'Histoire."