Le Petit Prince veut renforcer son rayonnement mondial. C'est désormais au sein de LPP Group, holding issue de l'alliance entre la succession Antoine de Saint-Exupéry et Inspiring Sport Capital (ISC) et que les activités en lien avec le héros d'Antoine de Saint-Exupéry seront exploitées. L'entité est née de la réunion par ISC autour de la succession Antoine de Saint Exupéry d'un pool d’investisseurs privés parmi lesquels Cabestan Associés (famille Henriot), Nouvel Atlas (famille Lemarchand), Cazoo Finance et Aquasourça. Début novembre, elle a recruté Sophie Kopaczynski comme directrice générale.
Forte de 20 ans d'expérience dans les industries culturelles (Canal +, Studiocanal, Vivendi) et ancienne CEO de The Copyrights Group, Sophie Kopaczynski a notamment développé l'univers de l'ours Paddington en franchise mondiale.
Interrogée par Livres Hebdo en compagnie d'Olivier d'Agay, petit-neveu d'Antoine de Saint-Exupéry et directeur de la succession depuis 20 ans, la nouvelle directrice générale de LLP Group détaille cette alliance avec Inspiring Sport Capital, fondé par Lucien Boyer et Laurent Damiani. Cette opération intervient après le décès l'année dernière de François d'Agay, oncle d'Olivier et dernier des quatre neveux héritiers d'Antoine de Saint-Exupéry, qui était âgé de 99 ans, marquant ainsi l'entrée dans une nouvelle ère pour la gestion de l'œuvre.
Faire du Petit Prince une œuvre culturelle majeure pour toutes les générations
Sophie Kopaczynski affiche une ambition claire : « Nous avons un objectif qui est clairement affiché de développer une franchise et de faire du Petit Prince une œuvre culturelle majeure pour toutes les générations et sur tous les territoires. » Les décisions se prennent désormais de manière collégiale entre la famille et les investisseurs. « L'idée, c'est que justement, ensemble, on se nourrisse les uns les autres pour prendre les meilleures décisions, pour aller vers l'objectif commun qu'on s'est fixé », explique-t-elle.
Le choix d'Inspiring Sport Capital, bien que le fonds soit principalement dédié au sport, repose sur l'expertise de ses fondateurs dans l'entertainment. « Lucien Boyer (co-fondateur de ISC) et moi, on a travaillé ensemble sur la propriété intellectuelle de Paddington dans le groupe Vivendi. Il y avait cette expertise-là chez Lucien et son appétence et son amour de l'entertainment », précise Sophie Kopaczynski.
Cette professionnalisation répondait à un besoin identifié par la famille. « Nous étions arrivés à un certain niveau dans nos ambitions et nos objectifs, à un point où nous-mêmes, nous ne pouvions plus espérer progresser autant que ça », confirme Olivier d'Agay, également président de la Fondation Antoine de Saint-Exupéry pour la Jeunesse depuis 2024.
Contenus audiovisuels
La transformation en franchise mondiale reposerait principalement sur la création de contenus audiovisuels. « Si on veut toucher toutes les générations, on sait aussi que les contenus visuels sont absolument clés », affirme Sophie Kopaczynski. L'équipe travaille déjà « sur des projets de films et de séries » et explore « des catégories un peu immersives pour que les gens puissent s'approprier encore plus le Petit Prince ».
Cette stratégie vise également à développer la marque sur des territoires où elle reste encore peu présente, malgré le travail déjà accompli à l'échelle mondiale. « On veut amplifier la possibilité de diffuser son message le plus largement possible avec les moyens de communication d'aujourd'hui », ajoute la directrice générale. Cette approche s'inscrit dans la conviction que « le Petit Prince puisse être une référence culturelle pour l'ensemble des générations ».
Succès éditorial continu
L'œuvre d'Antoine de Saint-Exupéry connaît un succès éditorial continu. Traduit en plus de 650 langues, Le Petit Prince est le livre le plus traduit au monde après la Bible et se vend encore à plusieurs millions d'exemplaires chaque année. Un musée vient d'ailleurs d'ouvrir à Soleure en Suisse, sur 1 000 m², pour présenter l'ensemble de ces traductions.
La succession organise également une dizaine d'expositions par an dans le monde entier. « Aujourd'hui le monde a besoin du Petit Prince », affirme Olivier d'Agay. Face aux angoisses liées à la guerre, au climat ou à l'avenir, celui-ci « apporte des réponses ». Il insiste sur la modernité de l'œuvre : « Les thématiques abordées dans Le Petit Prince sont complètement actuelles », qu'il s'agisse de questions philosophiques individuelles ou de la protection de la planète.
Cette vision doit composer avec une réalité juridique complexe : l'œuvre est entrée dans le domaine public dans la majorité des pays depuis 2005, notamment au Japon et en Asie, puis en 2015 en Europe et en Amérique du Sud. Seuls trois pays protègent encore les droits d'auteur : la France (jusqu'en 2032 grâce au statut d'« auteur mort pour la France »), ainsi que les États-Unis et le Mexique.
Protection du nom et des personnages
« Tout mon travail a été de remplacer les droits d'auteur perdus par d'autres sources de revenus, dont l'exploitation des marques », explique Olivier d'Agay. Le modèle économique repose désormais sur la protection du nom et des personnages dans tous les secteurs d'activité, à l'exception du livre original.
Pour le petit-neveu d'Antoine de Saint-Exupéry et directeur de la succession depuis 20 ans, Le Petit Prince, « c'est un peu Hello Kitty avec des valeurs. C'est joli, c'est poétique, c'est philosophique, mais ce sont aussi des valeurs très importantes. »
