Easy Cash, premier réseau français de seconde main avec 165 magasins, a enregistré une progression de 10,5 % en volume et 5 % en valeur sur le segment manga au premier trimestre 2025, selon son baromètre publié à la veille de la Japan Expo (en document partagé à gauche de l’article).
Cette performance contraste avec la chute de 14,5 % des ventes de mangas neufs sur la même période. L'enseigne a écoulé 441 000 mangas en 2024, un record qui positionne cette catégorie comme pilier de son rayon livres avec 25 % des ventes totales, devançant romans (24 %) et polars (21 %).
Un modèle économique hyperlocalisé
Le réseau affirme fonctionner selon une logique hyperlocale : constitution des stocks et vente s'effectuent dans un rayon moyen de 20 kilomètres. Les produits achetés aux particuliers sont immédiatement remis en vente en physique et click and collect. « Pour acheter une cinquantaine de mangas, ça va nous prendre moins de cinq minutes si le client est d'accord avec l'offre de prix », explique à Livres Hebdo Valentin Klein Di Giacomo, directeur du développement chez Easy Cash, qui considère que son entreprise appartient à l'économie circulaire : « le métier de l'économie circulaire, c'est un métier local ». L'enseigne a développé des outils de scanning permettant d'évaluer instantanément le prix d'achat et de fixer automatiquement le prix de vente.
Prix et collections complètes, moteurs de l'achat
Avec un prix moyen inférieur à 4,50 euros - soit deux fois moins cher qu'un manga neuf - l'argument tarifaire reste déterminant. Mais la capacité à constituer des collections complètes constitue le second levier d'attraction. « C'est très facile chez nous d'avoir du tome un au tome 10 et d'être capable de se prendre toute la collection à un prix plutôt intéressant », argumente Valentin Klein Di Giacomo, qui assure qu’aucun magasin ne se fournit via du déstockage.
Le top des ventes 2025 dans l’enseigne confirme cette tendance : Naruto place quatre volumes dans le top 10, One Piece et Fairy Tail trustent également les premières places. Selon leur baromètre, les premiers tomes et intégrales dominent les ventes, répondant aux besoins des « binge-readers » : 20 % des lecteurs de mangas achètent plus de 50 volumes par an, contre 8 % seulement pour la littérature générale.
Une clientèle transformée par le Covid
La crise sanitaire a modifié les comportements. 23 % des lecteurs interrogés privilégient désormais l'occasion et les achats en ligne tandis que 55 % déclarent ralentir leur rythme de lecture face à une offre jugée trop dense. « Près d'un quart des lecteurs a changé ses habitudes depuis le Covid », constate Anne-Catherine Péchinot, directrice générale d'Easy Cash.
Cette évolution s'accompagne d'un rapport particulier à l'objet livre : 61 % des lecteurs de mangas conservent leurs volumes comme objets de collection, contre 37 % des autres lecteurs. Les volumes de rachat ont doublé en deux ans, mais seulement 15 % des clients pratiquent à la fois achat et revente, sur l’ensemble des produits de la marque.
Diversification vers les produits dérivés
L'écosystème manga dépasse le livre. Easy Cash a vendu plus de 11 292 produits dérivés en 2024, dominés par les figurines et jeux vidéo. One Piece règne sur les figurines (52 % des ventes), Demon Slayer sur les accessoires (43 %), tandis que Dragon Ball (51 %) et Naruto (42 %) s'imposent dans le gaming.

Cette expansion illustre « un nouveau modèle de consommation culturelle, dont la seconde main est devenue un levier clé », analyse Anne-Catherine Péchinot.
Stagnation de la BD franco-belge
Pendant que le manga explose, la bande dessinée franco-belge marque le pas avec 0 % de croissance à périmètre comparable. « C'est peut-être le seul rayon sur lequel on a de la stagnation », observe Valentin Klein Di Giacomo.
Face aux revendications du secteur sur la rémunération des créateurs via une taxe sur l'occasion, Easy Cash prône la concertation. « On ne peut pas être contre rémunérer les auteurs, mais notre inquiétude c'est qu'on ne souhaite pas que ça pénalise les lecteurs », argumente Valentin Klein Di Giacomo, qui organise actuellement un groupe de travail avec d'autres acteurs de l'économie circulaire.
Le baromètre révèle d'ailleurs une moindre sensibilité des lecteurs de mangas à cette problématique : 12 % seulement évoquent la rémunération des auteurs comme motivation potentielle, contre 15 % chez les autres lecteurs.
Easy Cash affiche 1,7 million d'unités vendues en 2024 et une croissance continue de son marché livre.