La chatte sur un toit brûlant. On n'en a jamais tout à fait fini avec Rachilde (1860-1953), comme on ne parvient jamais tout à fait à oublier ses excès, sa grandiloquence, sa manière de génie furieux, sa monstruosité même, tout ce que Léautaud résuma un jour en un mot cinglant : le « Guignol Rachilde ». Alors que Bouquins lui a consacré cet automne un volume d'œuvres choisies, Amours monstres, les toujours avisées éditions Bartillat rééditent peut-être le plus fascinant et insane à la fois de ses livres, d'abord paru en feuilleton entre 1891 et 1892, L'animale (1893). De celui-ci, c'est Jean -Lorrain (qui pourtant en avait lu d'autres en matière de décadentisme...) qui en parle le mieux écrivant à son propos : « Je viens de lire le livre le plus pervers, le plus malsain et le plus cruellement détraqué que je connaisse. » Il faut dire que l'autrice (qui, farouchement antiféministe, aurait détesté être appelée ainsi) n'y va pas avec le dos de la cuillère du signifié... Zoophilie d'abord, mais aussi pédophilie, fornication avec un homme d'Église, rien n'est tout à fait épargné au lecteur et l'on se demande ce qu'il en aurait été si ce catalogue des perversités avait dû paraître au xxie siècle. Enfin, il y a une certaine forme de naïveté assez plaisante dans ce qui n'est aussi qu'une éternelle quête d'un paradis perdu. En ce sens, l'histoire de cette femme qui court la nuit sur les toits avec les chats préfigure les films avec Musidora, est peut-être quelque chose comme le chaînon manquant entre Sade et Colette. Ce n'est pas rien.
L'animale
Bartillat
Tirage: 1 500 ex.
Prix: 12 € ; 288 p.
ISBN: 9782841007974
