Guérison collective. Dans ce nouvel essai, l'auteur, chercheur et thérapeute Juliet Drouar analyse l'articulation entre les traumatismes individuels et les manifestations des rapports de domination dans la société. Dans la continuité de ses travaux La culture de l'inceste (codirigé avec Iris Brey, Seuil, 2022) et Cui-cui (son premier roman, Seuil, 2025), Juliet Drouar explore l'impact des agressions subies au cours de l'enfance sur les adultes qu'ils deviennent et la manière dont elles participent à la dimension systémique des violences sociales et politiques (racisme, classisme, sexisme, validisme...).

« Il n'est pas question de justifier ou d'excuser [les personnes qui produisent des actes de domination] mais plutôt de comprendre, pour mieux les résoudre, les traumatismes comme le terreau de violences », explique l'auteur. Découpé en trois parties, Trauma. En finir avec nos violences, se présente à la fois comme un essai théorique mais aussi comme un guide pratique offrant des moyens concrets de réfléchir et de commencer à résoudre un certain nombre de problématiques liées au cercle vicieux que forme le couple violences et traumatismes. Comment reconnaître un traumatisme ou plusieurs qui se sont succédé ? Comment reconnaître un rapport de force, de domination ? Comment expliquer le déni qui règne autour de ces questions, au sein même des institutions médicales ?

Juliet Drouar convoque notamment le récent ouvrage d'Adèle Yon, Mon vrai nom est Elisabeth (Éditions du sous-sol, 2025), dans lequel l'autrice mène une enquête autour de son arrière-grand-mère, lobotomisée dans les années 1950, et révèle à travers elle toute une génération de femmes condamnées à l'internement et à la lobotomie sans raisons médicales, mais parce qu'elles troublaient l'ordre patriarcal en ne correspondant pas à la posture docile qu'il leur imposait : rester sagement à leur place. « La question de la santé mentale a souvent été instrumentalisée pour maintenir le pouvoir en place plutôt que pour venir en aide aux personnes et remettre en question un fonctionnement collectif », écrit Juliet Drouar.

Ce à quoi Juliet Drouar invite, c'est à la responsabilisation de chacun et chacune vis-à-vis de ses propres traumatismes ainsi que de ses propres actes de violence. L'auteur incite à apprendre à poser ses limites pour briser les relationnels abusifs. Ce qui pourrait passer par la connaissance de son histoire, par la reconnaissance et par l'expression de ses émotions et de ses réactions dans des situations données. « Le fait de ressentir un acte comme violent ne suffit pas à ce qu'il le soit. » Pour discerner les degrés de violences ou les situations à risques, Juliet Drouar donne des outils concrets, tel que le violentomètre, présente des mises en situation, énonce des questions à se poser face aux circonstances, propose des façons de se protéger et d'être accompagné, notamment dans le cadre d'un suivi psychiatrique médicamenteux, d'une thérapie individuelle ou de groupe, de méthodes spécifiques telles que l'EMDR ou l'IFS. Ce qui est visé dans ce texte accessible, clair et didactique, c'est une guérison collective.