« C'est un zèbre sans rayures, debout dans les herbes jaunes, avec deux enfants couchés dans son ombre. » Un roman qui s'ouvre par une telle phrase ne peut être mauvais. Brouillard est le nom de cet étrange zèbre. Et Alma, celui de la jeune fille qui le décrit ainsi car elle n'a jamais vu de cheval de sa vie.

En 1786 sur les hauts plateaux d'Afrique elle ne connaît rien d'autre que sa famille. L'autre enfant est son petit frère Lam qui lui demande si on peut choisir le nom des choses nouvelles. « On fait ce qu'on veut », répond fièrement la jeune fille souveraine. Une leçon de liberté que le petit frère expérimente dès le lendemain en disparaissant avec Brouillard. Alma part à sa recherche à travers tout le continent jusqu'aux rivages de l'Atlantique où elle arrive au moment même où accoste un navire de traite dirigé par un capitaine cruel et cupide, âpre au gain du commerce des esclaves. A bord a grimpé aussi un loustic sacrément dégourdi, Joseph Mars qui n'a pas sa langue dans la poche et plus d'un tour dans son sac.

Longtemps après avoir refermé ce roman à la langue puissante et délicate, on perçoit encore l'« armée d'ombres aux pieds ligotés avec le bruit des chaînes qui se mélange à celui des vagues léchant le sable ».