La librairie Mollat démarre la période cruciale de Noël avec un handicap de taille : la réduction du pass Culture lui coûte 50 % du chiffre d'affaires généré par ce dispositif depuis mars dernier, soit une perte mensuelle substantielle. « Contrairement à la communication erronée qui s'est déroulée, ce n'était pas du tout un pass manga. Nous vendions entre 3 000 et 4 000 références différentes par mois, avec un effet de longue traîne qui impactait l'ensemble des rayons », souligne à Livres Hebdo Pierre Coutelle, directeur du Livre de l’enseigne bordelaise.

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Malgré ce contexte, l'établissement anticipe une dizaine de jours décisifs avant Noël. « Je pense qu'il y a un effet de réassurance par le livre, qui reste le cadeau simple, facile, varié, où tout le monde trouve son bonheur », analyse-t-il. La bascule traditionnelle s'opère mi-décembre, lorsque les consommateurs prennent conscience qu'il ne reste que deux week-ends avant les fêtes.

Une machine logistique rodée depuis juin

Pourtant, c’est bien en amont que cette période de pic est façonnée sur les bords de la Garonne. La préparation démarre dès juin avec le choix des vitrines, réalisées depuis dix ans en partenariat avec l'école de communication visuelle (ECV). « Les vitrines d'une librairie, c'est son premier moyen de communication », insiste Pierre Coutelle. La métamorphose physique du magasin intervient fin novembre, avec une mise en scène spécifique et une PAO renouvelée chaque année.

En coulisses, les commandes de fin d'année se préparent dès l'été. Objectif : anticiper les volumes et obtenir de meilleures conditions commerciales. Résultat : jusqu'à 15 tonnes de livres réceptionnées quotidiennement en octobre, nécessitant des renforts logistiques. Les recrutements saisonniers débutent après les vacances de la Toussaint, en caisse, en rayon et pour le site Internet.

2024, une année historique

Face à la standardisation des meilleures ventes, Mollat mise sur la recommandation. L'enseigne propose 700 titres sélectionnés en ligne et 100 coups de cœur dans un livret papier, format réintroduit cette année face à une demande croissante. « Il y a une demande de recommandation vraiment très forte, mais qu'il faut de plus en plus cibler », constate le directeur.

Cette stratégie porte ses fruits pour le fonds, secteur crucial pour la librairie qui dispose de 180 000 références. « Les gens viennent chez nous parce qu'on a un goût de la distinction dans le cadeau. Ils savent qu'ils vont trouver le livre qu'on ne trouve pas d'habitude ». Le site Internet enregistre un pic d'activité, notamment sur les titres en rupture ailleurs.

La librairie Mollat innove en 2025 avec une librairie éphémère dédiée aux éditions Gallmeister, installée du 10 au 24 décembre dans un local voisin de l’enseigne, place Gambetta, à Bordeaux. - Photo DR

Le Goncourt 2025 La maison vide de Laurent Mauvignier fonctionne particulièrement bien cette année (lire par ailleurs). « C'est un Goncourt de libraires de premier niveau, plus facile à vendre quand vous avez un libraire qui l'a lu à côté », note Pierre Coutelle, qui anticipe d'excellents chiffres sur ce titre de 800 pages.

La librairie Mollat sort de quatre années exceptionnelles (2021-2024), dont l'an dernier constitue un record historique en 130 ans d'existence. « Les deux tiers au moins de la baisse d'activité en 2025 sont liés au pass », estime Pierre Coutelle. L'enjeu de cette fin d'année reste donc de limiter l'impact de cette amputation sur un exercice globalement plus difficile.