Livres Hebdo : Qu'est-ce qu'un Clac ?
Agossou Honfo : Ce sont des tiers-lieux qui allient à la fois une salle de lecture, une bibliothèque, et un espace destiné à l'animation culturelle. L'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) accompagne mais ne possède pas les centres. Ce sont les pays où ils sont qui en ont la responsabilité… Et cela fait quarante ans que ça dure !
Quels titres trouve-t-on dans un Clac ?
Les bibliothèques sont constituées d'un fonds qui varie entre 2 000 et 2 500 références, en fonction de la taille de la communauté desservie. Dedans, on trouve de la fiction à 60 %, et du documentaire à 40 %. Le fonds se sépare en quatre échelles : un fonds pays, qui est constitué de publications sur le pays par des auteurs nationaux et majoritairement édités localement ou dans la région, un fonds régional - par exemple Afrique de l'Ouest pour des pays comme la Guinée, le Niger ou encore le Togo -, un fonds général, qui est un fonds corpus francophone avec des auteurs de chaque continent, et un dernier plus spécialisé à destination des enseignants ou des professionnels. Le but est de pouvoir trouver dans un Clac à la fois des ouvrages qui vont parler aux jeunes, des livres techniques qui vont aider le maçon ou le plombier du coin et des titres qui vont servir à l'enseignant.
Pourquoi ce dispositif a-t-il été mis en place par l'OIF ?
Dès le début, l'objectif était de répondre à une nécessité d'accès au livre. C'est un défi encore d'actualité. Dans nos pays membres, en dehors des grandes villes l'offre n'est pas suffisante, voire inexistante, or les populations sont jeunes avec un large public scolaire qui a besoin d'accéder aux livres.
« Le Bénin est en train d'élaborer sa stratégie du livre et de la lecture. Le Togo aussi a intégré la politique de lecture à sa politique culturelle »
Remarquez-vous une prise de conscience de la part des services publics ?
Oui, les choses bougent. Par exemple, le Bénin est en train d'élaborer sa stratégie du livre et de la lecture. Le Togo aussi a intégré la politique de lecture à sa politique culturelle il y a quelques années. Pour autant, il reste un défi, celui de la mise en place de la politique, c'est-à-dire l'application concrète une fois la loi passée.
Comment les Clac s'adaptent-ils à la montée en puissance des acteurs du livre africains ?
On n'est pas des défenseurs de logos ou de drapeaux. Notre ambition à nous, ce n'est pas tant les Clac que d'accompagner les pays à mettre en place une politique de lecture publique. Les Clac sont un instrument pour y parvenir, pas une fin en soi.
Quels autres leviers avez-vous identifiés ?
De façon plus générale l'objectif est de rester, peu importe sous quelle forme, un contributeur au dynamisme des maisons d'édition locales et des professionnels du traitement des livres. Ces dernières années, les éditeurs locaux proposent de plus en plus de publications de qualité. Cela a toujours été dans notre ADN d'acquérir des ouvrages auprès d'éditeurs locaux mais jamais dans des proportions telles que nous avons vues récemment. Nous sommes notamment en train de réfléchir à une nouvelle sélection BD Afrique pour l'ensemble des pays membres du continent. Une autre piste est celle de la relocalisation de notre service de reliure.
C'est-à-dire ?
Une fois acquis, les livres sont envoyés pour reliure en France. C'est une manière pour nous de faire durer les ouvrages. Ce traitement peut rallonger leur durée de vie de trois à sept ans ! Pour l'instant, la société qui s'en occupe est basée à Paris, mais je suis sûr que dans nos pays il y a des régions avec des professionnels qui sont en mesure de faire ce travail. Pour un Clac au Bénin avec des livres locaux, pourquoi devrait-on faire passer les ouvrages par Paris pour les renvoyer au Bénin ? Le défi pour moi a alors été d'identifier, dans un certain nombre de pays, des relieurs. Aidé par des spécialistes, j'ai réalisé une cartographie avec des professionnels en Côte d'Ivoire, au Sénégal, au Cameroun, au Togo. Pour l'instant ils n'ont pas répondu mais je n'abandonne pas !
De nouveaux Clac devraient-ils voir le jour en 2026 ?
Plutôt en 2027. En ce moment, on est en train de travailler avec le Cameroun, où nous ne sommes pas encore présents. Treize localités ont été identifiées, on a bon espoir de pouvoir créer cette bibliothèque. D'autres Clac, comme ceux de pays tels que la RDC, ont été touchés au gré des crises politiques et humanitaires. Certains, comme le Rwanda, n'ont pas survécu à ces crises. Notre envie est donc d'accompagner leur redynamisation, leur consolidation, voire leur renaissance.
