"En ce temps où la place de la Chine dans le monde s’impose plus par ses exploits économiques que par l’éclat de sa littérature", écrit, dans sa préface, Rémi Mathieu, maître d’œuvre de cette entreprise, c’est le moment rêvé, pour l’Occidental, de découvrir sa poésie. Grâce à cette Anthologie, ce sont 1 900 poèmes et 400 auteurs traduits de la langue han qui défilent sous nos yeux.
Depuis les origines, le Shijing, mère de toutes les anthologies compilée par l’illustre Confucius lui-même (551-479 avant J.-C.), qui rassemblait des textes dont le plus ancien remonte au XIe siècle avant notre ère : "Guan-guan, glatit l’aigle pêcheur." Jusqu’aux derniers poèmes de Haizi, né en 1964 et qui s’est suicidé à l’âge de 25 ans. En passant par le grand Li Bai (701-762), maître de la période Tang (618-907), considérée comme l’âge d’or de la poésie chinoise.
La poésie chinoise classique est une poésie sophistiquée, variée dans son style, sa forme et son inspiration, écrite par des lettrés fonctionnaires du pouvoir, ou bien par des aristocrates. Même l’impératrice tang Wu Zetian (624-705), une femme impitoyable, aurait composé un émouvant poème d’amour, La femme de vos désirs.
Au XXe siècle, la poésie a fait sa révolution, elle s’est ouverte sur le reste du monde, a abandonné les formes classiques pour le vers libre, et les poètes ont changé de statut, vivant de leur plume. A quelques exceptions près. Un certain Mao Zedong (1893-1976) par exemple, qui n’écrivit pas que le Petit livre rouge. Il a aussi commis quelques poèmes de circonstance. Rien à voir avec son collègue Guo Moruo (1892-1978), un rebelle influencé par Walt Whitman.
Les Chinois "globalisés" d’aujourd’hui qui, selon Rémi Mathieu, aiment profondément leur poésie nationale, ne doivent pas lire tous les jours, même sur la Toile, des textes aussi libres. C’est l’une des centaines de pépites que recèle cette "Pléiade" d’exception. J.-C. P.