Big Brother saison 2. Il fallait oser. D'abord, s'attaquer à l'adaptation de 1984 de George Orwell : Xavier Coste l'avait fait de la plus belle des manières, dans un ambitieux roman graphique paru en 2021 (Sarbacane). Aujourd'hui, il ne propose rien de moins qu'une suite à ce chef-d'œuvre visionnaire, suivant d'anciens personnages et en inventant de nouveaux, dans ce monde en guerre perpétuelle, veillé par Big Brother. Il s'appuie sur des jumeaux − Gordon, le fidèle au régime, Lloyd, le résistant − pour explorer les thèmes de la délation, de la culpabilité, de l'asservissement par le travail, de la manipulation de l'information, de la perte d'identité, de la puissance de l'art… Où l'on comprend encore mieux la réussite terrifiante du projet totalitaire de Big Brother qui, pas à pas, n'a rien laissé au hasard dans l'annihilation de l'humanité de chacun. En cela, Xavier Coste − aidé par le coscénariste Philip Börgn, qui n'est autre que son éditeur Frédéric Lavabre − ne fait que creuser les idées de l'œuvre originelle, finalement plus crédible que paranoïaque quand on l'analyse à la lumière des dérives autoritaires actuelles des grandes nations ou du contrôle de l'opinion par les médias de masse. À l'issue, glaçante, on est presque frustré de ne pas voir Xavier Coste aller encore plus loin dans la folie et l'horreur… Mais la palette expressionniste de l'auteur et la cohérence du récit suffisent à saluer la réussite de ce projet audacieux. Il fallait oser prendre la suite d'Orwell, le défi est relevé.