4 septembre > roman Etats-Unis

Claire Messud est l’une des plus attachantes romancières américaines d’aujourd’hui. L’une des plus douée aussi. Son sens de la narration et sa finesse psychologique éclataient déjà dans La vie après (Gallimard 2001, repris en Folio) ou dans Les enfants de l’empereur (Gallimard 2008, repris en Folio). Elle a de nouveau pris son temps avant de revenir en librairie avec La femme d’en haut.

Avec La femme d’en haut, l’héroïne et narratrice de Messud, Nora Marie Eldridge, 42 ans, célibataire et plutôt jolie est née dans une famille ordinaire, dans une petite ville au nord de Boston où elle était jusqu’à récemment institutrice de cours élémentaire à l’école Appleton de Cambridge, Massachusetts. Voici quelqu’un qui a compris que "la vie consiste à choisir ses priorités. A comprendre comment l’imaginaire détermine le réel".

Page après page, elle raconte à la fois son parcours et ce qui a changé le cours de son existence. Le lecteur apprend qu’elle voulait devenir artiste, a été demandée en mariage mais n’a pas donné suite. Qu’elle s’est occupée de sa mère jusqu’à sa mort, et continue de veiller du mieux qu’elle peut sur son père. Nous sommes vite au courant de l’importance qu’a eue pour elle l’un de ses élèves, Reza Sahid, 8 ans, qu’elle avait d’abord croisé au supermarché, avant qu’il n’entre dans sa classe, débordant de charme et maîtrisant mal l’anglais.

Nora n’a pas succombé qu’à Reza, mais à ses parents aussi. A Sirena, Italienne, une femme qui a vécu à Paris, et qui accompagne aux Etats-Unis un mari, Skandar, Libanais d’origine palestinienne, ayant obtenu une bourse de l’université pour écrire son livre sur l’éthique et sur l’histoire. L’institutrice s’est mise à partager un atelier avec Sirena, qui crée des installations, des vidéos.

Nora aime à imaginer des miniatures qui la font entrer dans l’univers d’Emily Dickinson ou d’Edie Sedgwick. Elle est souvent invitée à dîner chez le couple, se sent proche de Reza, pris pour cible par ses camarades de classe, qui raffole de Zidane et d’Astérix, de Sirena et de Skandar, qui la raccompagnent à pied jusqu’à chez elle…

Claire Messud excelle dans ce splendide roman au ton feutré. On colle au plus près de Nora quand elle évoque sa colère, ses attentes, son désir d’intimité, sa peur d’un rejet. Lorsqu’elle danse, ivre, en soutien-gorge, et qu’elle se sent libre. Qu’elle se prend pour la Lucy Jordan de la chanson de Marianne Faithfull ou qu’elle s’en va passer un Noël chez une tante qui ne s’est jamais mariée et qui sent l’eau de toilette Yardley English Lavander. Al. F.

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