Disparition

Mort de l'animateur, producteur et auteur Thierry Ardisson

Thierry Ardisson est décédé le 14 juillet 2025 - Photo Joël Saget / AFP

Mort de l'animateur, producteur et auteur Thierry Ardisson

Thierry Ardisson s’est éteint à l’âge de 76 ans. Homme de télévision, l’animateur et producteur était aussi l’auteur de nombreux ouvrages dont le dernier, L’homme en noir, a paru en mai chez Plon.

Par Charles Knappek
avec AFP Créé le 14.07.2025 à 12h08

Animateur et producteur controversé, Thierry Ardisson est décédé lundi 14 juillet à 76 ans. L'homme en noir, star cathodique à partir des années 1980, a inventé un ton transgressif et lègue un impressionnant patrimoine audiovisuel.

« Quand je suis arrivé, il y avait à l'antenne un langage télévisuel prude et compassé. On s'est mis à parler comme dans la vie, de sexe, d'alcool et de drogue », rembobinait l'ancien publicitaire.

Il ne s'était pas fait que des amis dans le milieu : pour Bernard Pivot, il était « tellement mégalo qu'il croit avoir inventé la vulgarité à la télévision ».

Autodidacte, il crée une agence de pub, collaboré au magazine branché Façade, et écrit trois romans (voir encadré) avant de débuter à la télévision sur TF1 en 1985 avec Descente de police, version télé des interviews insolentes, en forme d'interrogatoire musclé, qu'il publiait dans le magazine Rock & Folk.

Suivront Scoop à la Une, Bains de Minuit, Lunettes noires pour nuits blanches, Télé Zèbres, Double Jeu, Ardimat, au hasard d'un va-et-vient incessant entre TF1 et Antenne 2.

« N'étant pas très à l'aise moi-même, je n'avais pas envie que les gens en face de moi le soient, d'où mon époque Lunettes noires où j'étais d'une agressivité incroyable », reconnaîtra-t-il plus tard. De ces émissions noctambules, Thierry Ardisson gardera le noir, qui « amincit ».

Un gros bosseur

Après trois ans de traversée du désert, ce défricheur, qui ne cachait pas avoir consommé en excès drogue et alcool plus jeune, présente en 1998 Tout le monde en parle sur France 2, talk-show à succès où il sonde des personnalités jusque dans leur vie privée, aux côtés du trublion Laurent Baffie.

Il participe à l’émergence dans les médias d'une génération d’écrivains qu’il reçoit dans son émission culturelle Rive Droite : Rive Gauche sur Paris Première, puis le soir dans Paris Dernière (qu’il produit). Et invite dans Tout le monde en parle : Frédéric Beigbeder, Michel Houellebecq, Virginie Despentes, Guillaume Dustan ou Lolita Pille

Il a également reçu de nombreux essayistes de tous bords, y compris les plus controversés. Ses émissions se révélant très prescriptrices à un moment ou les émissions spécialisées sur le livre se faisaient plus rares à la télévision.

Sommé de choisir entre le service public et Paris Première, il opte en 2006 pour la chaîne du câble et du satellite, où il anime 93, Faubourg Saint-Honoré, des dîners éclectiques filmés à son domicile.

Gros bosseur, Thierry Ardisson lance la même année Salut les Terriens ! sur Canal +, avant de migrer sur C8 en 2016. Mais l'émission s'arrête en 2019, après son refus de fournir ses émissions pour deux fois moins cher.

Jamais à court de concept, le vétéran du PAF revient brièvement en 2022 avec Hôtel du temps sur France 3, où il interroge des stars défuntes dont les visages et voix sont recréés grâce aux nouvelles technologies.

Et en 2024, il imagine le magazine de société Nos grandes décisions pour France 2, avec le trentenaire Hugo Clément aux manettes.

« Provocateur et érudit »

Certains programmes ont mal vieilli. Et sa manière d'interviewer, notamment les femmes, interroge aujourd'hui. Ainsi, l'écrivaine Christine Angot s'est dite humiliée à plusieurs reprises sur le plateau de Tout le monde en parle, en se souvenant de rires face à l'inceste sur lequel elle a écrit.

La Légion d'honneur remise par Emmanuel Macron début 2024 à l'animateur-producteur a fait polémique, suscitant la réprobation d'artistes comme Judith Godrèche.

Le chef de l'État avait alors rendu hommage à « un personnage d'une liberté totale, un provocateur et érudit ».

Mais, « aujourd'hui, les gens ne veulent plus rien dire à la télévision », déplorait le septuagénaire au même moment, regrettant une « aseptisation ».

Lors de sa dernière apparition à la télé, le 10 mai dans Quelle Époque ! sur France 2, il avait comparé Gaza à Auschwitz, ce qui avait fait polémique - il avait ensuite demandé pardon à « ses amis juifs ».

Né le 6 janvier 1949 à Bourganeuf (Creuse), d'un père ingénieur et d'une mère femme au foyer, Thierry Ardisson a passé une partie de son enfance en Algérie, puis en internat catholique en Haute-Savoie.

Foi catholique, royalisme et parisianisme

Il assume sa foi catholique, son parisianisme, ses convictions royalistes (se faisant le publiciste du prétendant espagnol au trône de France dans Louis XX, Olivier Orban, 1986) et également son appétit pour l'argent.

« Ardisson est un type torturé, exigeant, animé de la peur du lendemain » et « chez qui rien n'est jamais acquis », le décri le producteur Stéphane Simon, compagnon de route depuis plus de trois décennies et marqué à droite.

À 20 ans, il avait démarré au culot dans la publicité, inventant des slogans tels « Lapeyre, y'en a pas deux » et « Quand c'est trop, c'est Tropico ».

Thierry Ardisson a aussi été patron de presse - directeur de L'Ebdo des Savanes au début des années 1980, d'Entrevue dans les années 1990, où il est condamné pour divers articles tapageurs. Il s'est aussi essayé à la production de séries et films.

Marié à trois reprises, Thierry Ardisson a eu trois enfants avec la musicienne Béatrice Loustalan. Depuis 2014, il était l'époux de la présentatrice de TF1 Audrey Crespo-Mara.

Thierry Ardisson, un auteur prolifique

Les dernières
actualités