Tourné en Algérie par Gianni Amelio, «Le premier homme» arrive sur les écrans mercredi avec Jacques Gamblin dans le rôle d'Albert Camus. Le film est adapté du manuscrit inachevé de l'écrivain, publié chez Gallimard en 1994. Dès cette date, le producteur Bruno Pesery avait voulu adapter ce récit autobiographique. Mais Catherine Camus, fille de l'écrivain, n'a accepté le projet qu'en 2006.
Comme pour L'étranger, porté à l'écran par Luchino Visconti en 1967, c'est un cinéaste italien qui a mené à bien le projet: Gianni Amelio, Lion d'or à Venise pour Mon frère (1998), réalisateur également de Enfants volés, Les clefs de la maison, L'étoile imaginaire...
L'histoire débute en août 1957, lorsque Jacques Cormery/Albert Camus rend visite à sa mère dans Alger en état de guerre. L'écrivain, désormais célèbre, se souvient de ses années d'écolier et de son enfance pauvre dans le quartier de Belcourt...
Flashback sur l'année 1924, le jeune Camus, 11 ans (interprété par un gamin épatant, Nino Jouglet), est élevé par une mère analphabète et une grand-mère autoritaire. Son instituteur remarque en lui un excellent élève: grâce à une bourse, il pourra aller au lycée.
Camus, isolé politiquement
Le film, qui n'a rien d'un scrupuleux biopic, est construit de telle sorte que la partie 1957 contient beaucoup de choses absentes du livre - un rééquilibrage d'autant plus nécessaire que ce roman familial est resté inachevé. Gianni Amelio a donc puisé, dans les archives ouvertes par Catherine Camus, la matière, les idées et parfois même les dialogues des séquences pour l'année 1957. C'est la période pendant laquelle Camus, isolé politiquement, dénonce les attentats aveugles et plaide encore pour la coexistence pacifique entre les deux communautés, arabes et pieds-noirs.
Du côté des comédiens, Denis Podalydès (l'instituteur) rend ainsi hommage à son partenaire Jacques Gamblin: «Il a l'art d'être présent/absent. Il n'est pas dans la composition, il ne cherche pas à montrer comment “jouer Camus”. Au contraire, il l'incarne comme un homme humble, presque effacé, avec une grande pureté».
Trois magnifiques portraits de femmes complètent la distribution: la rugueuse Ulla Baugué (la grand-mère), la sensuelle Maya Sansa (la mère jeune) et la grande Catherine Sola (la mère en 1957) à qui l'écrivain vient avouer: «Tout ce que j'ai fait de bien dans ma vie, c'est à toi que je le dois.»