Le 59
e Festival du Film de Locarno (Suisse) a présenté en avant première mondiale le documentaire
Feltrinelli. Ce film d’Alessandro Rossetto présente aussi bien Giangiacomo Feltrinelli, éditeur résistant et militant, que l’empire qui lui a survécu, notamment ses librairies et espaces culturels (86 points de vente, 330 millions d’euros de C.A.).
Le documentaire révèle par petites touches la personnalité complexe de celui qui brava la censure soviétique en éditant Docteur Jivago ou s’afficha ouvertement avec Fidel Castro.
Décédé en 1972 alors qu’il tentait de faire exploser un pylône électrique, Feltrinelli a eu le temps en 15 ans de bâtir une société d’édition (actuellement 6% du marché italien et 18 des 100 titres les plus vendus en 2004), un réseau de distribution et une fondation accumulant la plus grande collection d’ouvrages communistes.
À coup d’allers et retours dans le temps, entre des archives d’époque et des témoignages contemporains, le spectateur voit se confronter cet idéal communiste qui habitait le Milanais et la force implacable du libéralisme qui lui a succédé.
Cependant, le grand intérêt de ce documentaire est de nous faire voyager dans les coulisses de l’édition, croisant les opinions d’une auteure d’un premier roman comme celles d’un négociateur à la Foire de Francfort, d’un lecteur type comme du patron du groupe, de sa veuve comme d’Amos Oz. Des rangées de vieux livres aux espaces aseptisés d’aujourd’hui, Feltrinelli est le portrait d’un métier, plus que celui d’un destin exceptionnel. Les convictions – discours politiques inclus - ont laissé place au pragmatisme – sur fond de musique jazzy en ambiance.
Le documentaire devait être projeté deux fois. Le festival a du ajouter deux autres séances pour satisfaire la demande, alors même qu’il n’était pas traduit ni en anglais ni en français !