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Le regain, encore timide mais certain, du marché des livres audio, et l’illustration musicale via les sites internet, méritent de se pencher sur le régime particulier de la durée de droits dits voisins qui est en pleine modification.

La jurisprudence a depuis longtemps pris conscience que, parallèlement aux œuvres en tant que telles, les interprétations de ces mêmes œuvres méritaient largement elles-aussi d'être protégées. La Convention de Rome de 1961 était déjà consacrée à ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui les droits voisins. 1971 a vu la naissance d'une Convention de Genève spécifique aux droits voisins des producteurs de phonogrammes. Pour sa part, la France a attendu la loi du 3 juillet 1985 pour inscrire cette reconnaissance en droit positif interne. Celle-ci concerne en plein le cas des livres audio, lus par leur auteur comme par un comédien. Sans oublier les livres-disques et autre sites internet d’éditeurs !

C'est ainsi que les artistes-interprètes bénéficient expressément de droits inscrits dans le Code de la propriété intellectuelle (CPI), qui ont été également reconnus de façon similaire au profit des producteurs de phonogrammes (c'est-à-dire de disques) et de vidéogrammes (c'est-à-dire des cassettes vidéo), ainsi qu'aux entreprises de communication audiovisuelle. 

Jusqu’ici, la protection des droits voisins est limitée, aux termes de l'article L. 211-4 du CPI, à une durée de cinquante années à partir de « l'interprétation pour les artistes-interprètes », de « la première fixation d'une séquence (...) pour les producteurs » et de « la première communication au public (...) pour les entreprises de communication audiovisuelle ».

Les acteurs, comme les musiciens ou encore les chanteurs, se voient tous accordés des droits voisins.

Les artistes-interprètes sont titulaires de droits moraux sur leur interprétation, comme cela est le cas en faveur des auteurs eux-mêmes. Les droits moraux des artistes-interprètes sont toutefois moins nombreux que ceux des auteurs. Selon l'article L. 212-2 du CPI, « l'artiste-interprète a le droit au respect de son nom, de sa qualité et de son interprétation. Ce droit inaliénable et imprescriptible est attaché à sa personne. Il est transmissible à ses héritiers pour la protection de l'interprétation de la mémoire du défunt ». Il ne peut donc user, de par la loi, ni d'un droit de divulgation ni d'un droit de retrait ou de repentir.

Les droits patrimoniaux permettent à l'artiste-interprète d’autoriser (seulement par écrit) ou de s'opposer, aux termes de l'article L. 212-3 du CPI, à « la fixation de sa prestation, sa reproduction, et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l'image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l'image ».

Depuis quelques années, les artistes-inteprètes (et leurs producteurs) se sont plaints de la discrimination dont ils étaient victimes : certains chanteurs se retrouvent sans droit, un demi-siècle à peine après une immense succès, alors que l’auteur du texte interprété continue de percevoir des redevances jusqu’à leur décès (et leurs ayants droit pendant soixante-dix ans ensuite.

C’est pourquoi une Directive en date du 27 septembre 2011 a prévu d’allonger la durée des droits voisins de cinquante à soixante-dix ans. La ministre de la Culture a donc, le 22 octobre dernier, présenté en conseil des ministres le projet de transposition de cette directive en droit interne.

Ajoutons que la France va profiter de l’occasion pour que la loi englobe aussi le statut des œuvres orphelines.

Pour ce qui est des droits voisins, le texte ne résoudra pas l’inadéquation entre droit d’auteur et droit voisin, mais va changer la donne économico-juridique de tous les enregistrements sonores. Les contrats conclus à l’occasion de la réalisation de livres-audio – dont le succès outre-atlantique commence, après le rôle de pionnier joué il y a quelques années par les éditions des Femmes, à gagner les librairies européennes, vont devoir être révisés en ce sens.

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