Avant-critique Biographie

Clément Dirié, "Valadon" (Les Pérégrines)

Suzanne Valadon L'avenir dévoilé, ou La tireuse de cartes, 1912. - Photo © Association des Amis du musée du Petit Palais, Genève

Clément Dirié, "Valadon" (Les Pérégrines)

Rentrée littéraire

L'historien et critique d'art Clément Dirié retrace le parcours étonnant de Suzanne Valadon, peintre autodidacte, à qui le Centre Pompidou consacre une rétrospective.

Parution 10 janvier

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Par Sean Rose
Créé le 12.01.2025 à 11h00

L'icône Valadon. De Sonia Delaunay à Louise Bourgeois en passant par Frida Kahlo, Yayoi Kusama ou Cindy Sherman... Dans l'art moderne et l'art contemporain, les femmes ne manquent pas. Cela a commencé avec les impressionnistes qui accueillent en leurs rangs une Berthe Morisot ou une Mary Cassatt. En art ancien, rares sont les noms féminins que la postérité a retenus : Artemisia Gentileschi à l'âge baroque, Élisabeth Vigée Le Brun peintre de cour sous Louis XVI... À dire vrai, dans l'histoire de l'art, les femmes artistes ont été invisibilisées. Le parcours de Suzanne Valadon, que retrace l'historien de l'art Clément Dirié dans la collection « Icônes » aux éditions Les Pérégrines, est d'autant plus incroyable que dans ce milieu artistique majoritairement composé d'hommes, plutôt issus de la bourgeoisie, elle est une femme, et de milieu ouvrier. Née en province et montée à Paris en 1870 avec sa mère blanchisseuse, elle est un temps acrobate avant qu'un accident l'empêche de poursuivre sa carrière dans le cirque. Elle pose pour Puvis de Chavanne, Renoir, Toulouse-Lautrec... La surnommée Maria n'est pas encore Suzanne. Mais la jeune femme ne se contente pas d'être une muse ; auprès des peintres, elle veut apprendre. Autodidacte, elle tire profit de sa fréquentation de Puvis de Chavanne ou de Degas dans l'atelier duquel elle s'essaye à la gravure. En 1896, elle s'installe devant un chevalet et peint. Le galeriste au nez creux Ambroise Vollard l'intègre dans son Album des peintres-graveurs. En 1909, elle participe pour la première fois au Salon d'automne ; en 1920, elle en est nommée sociétaire ; s'ensuivent monographie, rétrospectives, contrats avec des galeries... jusqu'à sa participation au Salon des femmes artistes modernes (FAM) en 1933 et à l'achat d'un grand nombre de ses œuvres par l'État français en 1937, l'année précédant sa mort.

Suzanne Valadon avait fait scandale avec son premier tableau, un nu, Adam et Ève (1909), où elle représentait frontalement son jeune amant André Utter sous les traits adamiques, exhibant sans vergogne sa virilité qu'une feuille de vigne ultérieurement rajoutée dut recouvrir. Épouse du décorateur et critique catalan Miquel Utrillo (dont elle eut un fils, le futur peintre Maurice Utrillo), puis d'Utter, maîtresse de Satie... la vie de Valadon fut aussi haute en couleur que son œuvre distinctive, au chromatisme franc et aux figures cernées de noir. Dès le 15 janvier 2025, le Centre Pompidou à Paris consacrera à la peintre de Montmartre une grande rétrospective.

Clément Dirié
Valadon
Les pérégrines
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 16 € ; 224 p.
ISBN: 9791025206614

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