Un privé de service public. Ex-flic devenu détective privé, Easton Newburn a su se rendre indispensable à New York. Tant pour les malfrats que pour les forces de l'ordre. Car, sous contrat avec les différentes familles du crime organisé, il fait en sorte de maintenir une forme de paix sociale, profitable au business de chacune comme aux statistiques de la délinquance. Dès qu'un truand est retrouvé mort ou qu'un gang est attaqué, Newburn enquête, avec la bénédiction de la police, pour trouver le coupable en même temps que la manière de calmer le jeu et d'éviter une vendetta. Indispensable, on vous dit !
Remarqué avec le détonnant Sex Criminals, mais aussi actif sur des licences comme Daredevil et Batman (Urban Comics publie deux de ses aventures du Dark Knight en février), le scénariste canadien Chip Zdarsky se frotte ici au polar et réussit à modérer son habituel ton goguenard. Mais il garde tout de même une distance ironique avec le genre noir et ses figures imposées. S'il choisit un héros bâti pour l'emploi - élégant mais très costaud, doté d'un pouvoir de déduction fin et d'un carnet d'adresses sans fin -, il le double d'une jeune assistante black plus moderne, et, surtout, envoie ce duo dans des situations rocambolesques, à mi-chemin entre Les Soprano et Breaking Bad. Le fils d'un mafieux italien assassiné ? Le boss des yakuzas dézingué ? Un homme de main russe trucidé ? Newburn et Emily sont là. Mais les soucis et les erreurs du passé aussi...
Pour mettre en images ce polar à la fois détendu et violent, mais surtout très accrocheur, le Britannique Jacob Phillips lorgne davantage vers une ambiance réaliste à la Gotham Central (chef-d'œuvre d'Ed Brubaker et Greg Rucka, dessiné par Michael Lark) que vers le design très marqué de son père, le talentueux Sean Phillips (Criminal, Fondu au noir, Reckless...) dont il est aussi parfois le coloriste. Et c'est justement par son utilisation des couleurs que le dessinateur de Texas Blood se distingue et donne une patine inédite au roman noir : souvent tranchées, voire flashy, ses teintes illuminent les séquences urbaines et les intérieurs par des ambiances étrangement chaleureuses. Newburn confirme donc que le polar en BD peut se renouveler avec élégance, même sur des bases a priori très classiques.
Newburn, t. 1. Ils savent qui je suis Traduit de l’anglais par Jérôme Wicky
Urban Comics
Tirage: 7 000 ex.
Prix: 10 € ; 168 p.
ISBN: 9791026821786