Le Centre national d'art et de culture Georges Pompidou se refait une beauté. Un programme de travaux techniques nécessaire à l'entretien du Centre Pompidou près de cinq décennies après son inauguration en 1977 a été acté en 2020 avec le soutien du ministère de la Culture. Il permettra notamment la rénovation et le désamiantage de la totalité des façades, la mise en sécurité incendie, une meilleure accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, et l’optimisation énergétique de l'ensemble de l'édifice. Ces travaux exigent la fermeture complète du site de 2025 à 2030 et notamment le déménagement de la bibliothèque publique d’information vers l’immeuble Lumière, Porte de Bercy, Paris-XIIe.
Les règles publiques pour déménager
Un marché public pour ce déménagement a été lancé mais il a fait un déçu qui a saisi le tribunal administratif de Paris, lequel a ainsi pu rappeler les principes habituels en la matière (Tribunal administratif, Paris, 26 Septembre 2024 – n° 2423223). En effet, le jugement du 26 septembre 2024 s’est penché sur la demande de la société perdante visant à suspendre et annuler la procédure d’attribution du lot pour des prestations de déménagement de mobiliers pour préparer la fermeture temporaire du site en vue de travaux. Invoquant des manquements dans la procédure d’attribution et l’absence de transparence concernant les motifs de rejet de son offre au profit de la société gagnante du marché.
Absence de transparence dans les motifs de rejet
Invoquant l’article R. 2181-1 du Code de la commande publique, la société perdante estimait que le Centre Pompidou aurait dû lui fournir des informations plus détaillées sur les caractéristiques et avantages de l’offre de la société gagnante et les notes obtenues avant négociation. Le tribunal a analysé les informations communiquées par le Centre Pompidou, qui ont inclus les notes globales et les rangs de classement des deux entreprises. Bien que certains détails littéraux sur les avantages de l’offre retenue n’aient pas été fournis, le tribunal conclut que les éléments transmis étaient suffisants pour permettre à la société perdante de contester la décision. Il a donc décidé que le Centre Pompidou n’a pas manqué à ses obligations de transparence et que la demande de suspension de la signature n’était pas fondée.
Régularité de la candidature de la société gagnante
La société perdante contestait la validité de la candidature de la société gagnante, arguant que cette société n’aurait pas fourni les attestations fiscales et sociales requises dans le délai imparti, en violation de l’article R. 2144-7 du Code de la commande publique et du principe d’égalité entre candidats. Le tribunal a examiné les preuves fournies par le Centre Pompidou, qui montraient que la société gagnante était en règle sur le plan fiscal et que les attestations requises ont été produites avant la signature du contrat. La situation de conformité fiscale de la société gagnante, bien que régularisée après la sélection, ne constituait pas, selon le tribunal, un motif de rejet de sa candidature, et cet argument était donc écarté.
Justification de la procédure avec négociation
Le Centre Pompidou a justifié le recours à une procédure avec négociation en raison de la complexité du projet, qui implique la gestion du déménagement de volumes importants de mobiliers, documents et équipements, et de l’impact financier de l’opération (environ 11,9 millions d’euros). Le tribunal, en analysant les motifs invoqués (manque de solutions immédiatement disponibles et spécificité des biens à déménager), a conclu que la procédure avec négociation était appropriée pour ce type de projet. La société perdante a soutenu que la négociation n’a pas permis d’améliorer son offre et que la procédure n’était pas équitable. Cependant, le tribunal a estimé que le Centre Pompidou avait organisé un entretien de négociation auquel la société perdante avait participé, aboutissant à une offre finale modifiée de sa part. La procédure respectait donc le principe d’égalité de traitement.
Critères d’évaluation des offres
La société perdante contestait la régularité de certains critères d’évaluation, notamment les sous-critères relatifs à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et aux moyens techniques proposés. Concernant le critère RSE, elle arguait que les sous-critères « réduction de l’empreinte carbone », « relations et conditions de travail », et « autres démarches » n’étaient pas suffisamment précis. Le tribunal a rejeté cette affirmation, notant que les attentes du Centre Pompidou concernant la politique RSE et les actions à mettre en place avaient été énoncées dans les documents de consultation. Ces sous-critères étaient, selon le tribunal, en lien avec l’exécution du marché et adaptés aux exigences environnementales et sociales du Centre.
Exigences minimales dans les documents de consultation
La société perdante faisait valoir que les exigences minimales n’avaient pas été explicitement mentionnées, ce qui aurait affecté sa capacité à soumettre une offre plus performante. Le tribunal a estimé que l’absence de mention explicite d’exigences minimales n’avait pas lésé la société perdante, puisqu’aucune difficulté dans la préparation de son offre n’avait été soulevée par cette dernière, et que le niveau de détail dans les documents de consultation était suffisant pour permettre une compréhension adéquate des attentes du pouvoir adjudicateur. Ce grief a ainsi été jugé inopérant.
Pom Pom Pidou
En définitive, le tribunal administratif a considéré que le Centre Pompidou avait bien respecté les obligations de transparence et de mise en concurrence dans l’attribution du marché. La procédure avec négociation était jugée appropriée compte tenu de la complexité du projet, et les critères d’évaluation des offres, notamment le critère RSE, étaient jugés en conformité avec les exigences du marché.