La crise sanitaire nous a durement éprouvés. Si nous avons relativement bien résisté au premier confinement, le deuxième s’est révélé catastrophique et a plombé la fin d’année. Mais l’aide de l’état, obtenue en fin d’année, nous a permis d’éponger quasiment toutes les pertes qui s’élevaient à 12 millions d’euros. En revanche, 2021, que nous abordions sans filet, nous a envoyé au tapis. Les trois premiers mois, nous avons subi la fermeture de 30% de notre réseau. Le printemps a été plutôt mou et l’été meurtrier : nous avons enregistré en deux mois 6 millions de perte, soit la moitié de celles de 2020. Septembre et octobre n’ont pas répondu à nos attentes en termes de chiffres. Ne me trouvant plus en mesure d’apporter les fonds nécessaires au renflouement de l’entreprise, j’ai décidé de placer France Loisirs et ses filiales logistiques sous la protection de la justice afin d’organiser la recherche d’un repreneur et de ne pas mettre en danger l’activité et les emplois.
Depuis 2015, vous avez personnellement abondé Actissia à hauteur de 30 millions d’euros. Combien vous manquait-il pour conserver France Loisirs dans le giron du groupe ?
Deux à trois millions. Cela m’aurait permis d’acheter le temps nécessaire à la mise en place de notre nouvelle formule d’abonnement, lancée toute fin septembre. Après l’échec de l’offre Pass-Lire, mise sur le marché en octobre 2020 mais trop compliquée et qui a créé beaucoup de confusion chez nos lecteurs, nous sommes revenus à quelque chose de plus simple. Nous proposons désormais une offre Classic et une offre Premium qui ont d’ailleurs rencontré l’adhésion du public. En octobre, nous avons recruté 13 000 nouveaux membres en boutique, un score que nous n’avions pas atteint depuis longtemps. En fait, c’est comme si nous venions de nager 20 kilomètres mais, arrivés à 100 mètres du bord, nous somme épuisés.
Cette procédure judiciaire va-t-elle entraîner des répercussions sur le groupe Actissia et notamment sur son autre filiale, Chapitre.com ?
Il va y avoir évidemment des dommages collatéraux en interne. Les dettes laissées par France Loisirs chez Actissia restent importantes et l’architecture du groupe est ainsi faite que toutes les sociétés fonctionnent en synergie. Mais je me suis aussi organisé pour que chacune puisse fonctionner indépendamment, ce qui est par exemple le cas du magazine Books.
Quelles sont les prochaines échéances ?
J’ai demandé au Tribunal de commerce la poursuite d’activité, qui nous a été accordée. Les magasins France Loisirs restent donc ouverts. Nous avons maintenant trois mois pour trouver un repreneur. Je suis optimiste, je pense qu’il y aura des prétendants. Grâce au travail de fonds entrepris depuis deux ans, nous sommes parvenus à faire évoluer le club et à créer un écosystème en ordre de marche. La fin de l’obligation d’achat nous a permis d’en transformer l’esprit et de s’orienter vers le concept de communauté de lecteurs, beaucoup plus pertinent. Le futur repreneur n’aura donc qu’à exploiter ce qui existe déjà.