Pour son cinquième roman traduit en français chez Belfond, Wally Lamb, l’auteur à succès du Chant de Dolorès (1999), ou du Chagrin et la grâce (2010), change de registre. Après les grosses mécaniques narratives, voici la petite musique intimiste.
Lamb nous ramène en 1964, sous la présidence de Lyndon Johnson, successeur de John F. Kennedy, assassiné un an auparavant. La famille Funicello, italienne et catholique, vit à New London dans le Connecticut. Les parents sont tenanciers du buffet de la gare routière. Ils ont trois enfants, Frances et Simone, les sœurs aînées, et le petit dernier, Felix, le héros et narrateur du roman, 10 ans, un peu "maigrichon". Lorsqu’il s’agit de faire une bêtise, de semer la panique dans sa classe de CM2 de l’école privée Saint-Aloysius de Gonzague, il n’est pas le dernier. Comme la fois où, par un tir intempestif, il réveille une chauve-souris qui terrifie son institutrice, la sévère sœur Dymphna, provoquant son départ et son remplacement par une Québécoise laïque et bien plus sympa. Ou encore cette autre fois où, devant se confesser chaque dernier vendredi du mois, il s’invente de bien curieux péchés.
Mais sa grande affaire, à Felix, ce sont ses premiers émois sexuels, favorisés par l’arrivée de Zhenya, une réfugiée russe "dessalée" et plus âgée, qui tente de s’intégrer à la société américaine, en maîtrisant d’abord sa langue : "Ma père est écrevisse", "Moi orthodonte", "Cette fille est une salopette", etc. Mais elle a d’autres charmes. C’est un peu Le petit Nicolas façon US, avec même le personnage du fayot, l’immonde Rosalie, bigote et cafteuse.
Pour écrire son roman, à l’origine un conte de Noël, Wally Lamb s’est inspiré de ses souvenirs personnels, et d’histoires que lui ont racontées des amis. C’est délicieux. On espère qu’il poursuivra dans cette veine "enfantine". J.-C. P.