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SGDL contre Joann Sfar : la polémique enfle

Joan Sfar - Photo © Olivier Dion

SGDL contre Joann Sfar : la polémique enfle

Les réactions se multiplient après que la Société des gens de lettres a annoncé son intention de porter en plainte en diffamation contre le dessinateur, président d'honneur de la Ligue des auteurs professionnels.

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Par Nicolas Turcev
Créé le 26.05.2020 à 22h00

La rupture est consommée entre la Ligue des auteurs professionnels et la Société des gens de lettres (SGDL). L'annonce par cette dernière, le 25 mai, de son intention de porter plainte pour diffamation contre le président d'honneur de la Ligue, Joann Sfar, a fait l'effet d'un casus belli.

La SGDL reproche à l'artiste une série de propos tenus sur France Inter, le 23 mai, dans l'émission "On n'arrête pas l'éco". L'artiste y critique la gestion du fonds d'urgence du CNL dédié aux auteurs par la SGDL dans des termes qui, selon l'association, laissent penser qu'elle fait un mauvais usage des fonds publics. Ce dont se défend Joann Sfar.

Si les tribunaux auront la tâche de trancher le débat juridique, le débat moral provoqué par l'assignation en justice d'un auteur par une organisation de défense des auteurs s'est déjà répandu sur la toile comme un brasier.

Samantha Bailly, présidente de la Ligue des auteurs professionnels et également membre de la SGDL, annonce sur Twitter qu'elle rend sa carte d'adhérent. "Qu’une société fondée pour et par des auteurs attaque aujourd’hui l’un des siens pour des propos qui lui déplaisent, propos qui sont d’ailleurs tronqués pour être interprétés d'une étrange façon, laisse sans voix. C’est pour moi, en tant qu’autrice, la ligne rouge", explique la responsable. Elle redoute par ailleurs ce que l'intention de la SGDL "peut révéler de techniques d'intimidation pour des auteurs et autrices qui auraient des opinions différentes de cette institution".
 
La douleur de la désunion

Mais pour Pierre Jourde, membre du comité d'administration de la SGDL, la faute incombe à Joann Sfar. Dans une tribune publiée sur le site de l'Obs, il estime que le dessinateur a accusé la SGDL de "détournement de fonds publics", une allégation "très grave", "mensongère" et "dégueulasse". "Ce fonds [du CNL] est intégralement redistribué, jusqu’au dernier centime. Cette somme est gérée sans aucune opacité, collégialement, par des représentants de diverses associations d’auteurs et de traducteurs", tient à rappeler Pierre Jourde.

Après cette passe d'armes entre les deux associations, l'écrivaine et journaliste Emmanuelle Friedmann a exprimé, sur Twitter, sa "douleur [de] voir que nous [les auteurs] ne parvenons pas à être unis à un moment où nous devrions l'être".

C'est également le sens de l'édito rédigé par l'éditeur et spécialiste de la bande dessinée Didier Pasamonik pour le site ActuaBD. "A l'exubérance de l'un a répondu un manque total de sang froid de la part de l'institution", juge le journaliste, qui invite à dépasser la "bataille d'officines" pour "faire d'une mauvaise polémique un vrai débat" sur le statut de l'auteur.

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