Vendredi 13 juin, pour la première fois, toutes les organisations syndicales s’unissaient pour lancer un appel à la grève dans les bibliothèques parisiennes. Autre fait inédit : la participation au mouvement d’un nombre significatif de personnels de direction. Autant de signes du profond malaise ressenti par les agents des bibliothèques de la capitale, tous grades confondus. Suppression d’une cinquantaine de postes au cours des cinq dernières années, disparition des sections discothèque des plus petits établissements (1), réduction des activités du Service du document et des échanges (SDE) qui remplit un certain nombre de missions pour l’ensemble du réseau : les motifs d’inquiétude ne manquent pas. Plus grave encore, les personnels dénoncent des méthodes de management opaques et même brutales, en particulier envers des directeurs d’établissement, dont une douzaine ont été suffisamment ébranlés pour avoir sollicité un suivi psychologique. Au point de parler de risques psychosociaux. "Nous assistons à la destruction systématique de personnes qui sont de bons professionnels, expérimentés et estimés par leurs collègues, mais qui ont déplu pour des raisons qu’on ignore", s’indigne une conservatrice venue manifester devant la bibliothèque Marguerite-Duras ce vendredi 13 juin. "L’administration est entrée dans une logique comptable. On remplace des conservateurs par des bibliothécaires payés moins cher pour faire le même travail, dénonce la directrice adjointe d’un établissement, très remontée. Il n’y a aucune considération pour nos métiers et nos compétences."
Interpellé par les manifestants, Noël Corbin, le tout nouveau directeur des affaires culturelles de la Ville de Paris, a pris acte de la gravité de la situation et de la défiance éprouvée par les agents. "Je veux restaurer la confiance et travailler en toute transparence", a-t-il promis. Lors de sa rencontre avec les représentants syndicaux mardi 17 juin, il a confirmé les engagements pris devant les manifestants : gel des suppressions de discothèque, visite du SDE début juillet pour évaluer son activité. Entre les problèmes budgétaires de la mairie et les revendications des différents corps de métiers de la ville, la perspective d’élargir le nombre de bibliothèques ouvertes le dimanche ne fait plus partie de l’actualité immédiate, malgré la création de la mission "Travail dominical et nocturne à Paris. Etat des lieux et perspectives", dont les conclusions seront remises en décembre.
Véronique Heurtematte
(1) Voir LH 993 du 11.4.2014, p. 47.