La situation est inédite. Alors que la plupart des maisons d'édition scolaire ont renforcé dès juin leurs équipes pour pouvoir assurer la réalisation des nouveaux manuels de lycée, les nouveaux programmes, qui vont impliquer un grand boulversement de la production éditoriale, ne sont toujours pas prêts. « Nous avons même loué des espaces à la tour Montparnasse. Si nos éditeurs ne se tournent pas les pouces, ils travaillent à blanc pour le moment », déplore Yves Manhès, directeur de Belin Education. Même ambiance dans les filiales éducation d'Albin Michel, Magnard, Vuibert et Delagrave, où une vingtaine de personnes patientent depuis cet été. « Les éditeurs sont au-delà du stress », s'irrite Isabelle Magnard, directrice du pôle éducation d'Albin Michel.
D'après la loi, les nouveaux programmes doivent être prêts un an avant leur mise en place effective, à la rentrée scolaire. Pour une installation prévue à la rentrée 2019, les éditeurs auraient donc dû en prendre connaissance en septembre, mais le comité d'experts chargée de les rédiger n'a été nommé que début juin. « On table sur début novembre pour obtenir les premiers éléments concernant ces 80 projets de programmes », estime Célia Rosentraub, directrice générale d'Hatier (Hachette Livre) et nouvelle présidente des Editeurs d'éducation, le groupe des spécialistes du scolaire au Syndicat national de l'édition.
Les équipes d'auteurs, d'éditeurs mais aussi d'iconographes et de maquettistes ont été recrutées tôt en raison de la concurrence interne au secteur. « Nous n'avons pas le choix. Certains profils se font rares, notamment dans le domaine scientifique », explique la directrice du pôle éducation d'Albin Michel. Reste à espérer que les programmes arrivent le plus tôt possible. « Si on ne parvient pas à lancer les impressions des manuels fin mars, on ne pourra pas proposer les spécimens aux professeurs pour qu'ils fassent leur choix au printemps », s'inquiète Célia Rosentraub. Les enseignants pourraient avoir à se décider à partir d'épreuves numériques.