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Groupe Lefebvre : « Nous structurons notre marque pour déployer notre IA dans toute l'Europe »

Pierre Gomy, directeur de communication et Anne-Laure Chaumeil, directrice adjointe du pôle édition du groupe Lefebvre. - Photo Groupe Lefebvre

Groupe Lefebvre : « Nous structurons notre marque pour déployer notre IA dans toute l'Europe »

Nouveau nom, nouvelle identité visuelle, nouvelles ambitions… Le groupe Lefebvre (anciennement « Lefebvre Sarrut ») s'affirme un peu plus comme un acteur de référence de l'édition juridique sur la scène européenne. Pierre Gomy, directeur de la communication et Anne-Laure Chaumeil, directrice adjointe du pôle édition s'en expliquent à Livres Hebdo.

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Par Élodie Carreira
Créé le 24.03.2025 à 14h17 ,
Mis à jour le 25.03.2025 à 08h45

Livres Hebdo : Le groupe Lefebvre Sarrut devient tout simplement le groupe Lefebvre, pourquoi ? 

Pierre Gomy : C’est une transformation que nous avons entamée il y a quelques années et qui s’accélère pour répondre à notre ambition de devenir leader des services proposés aux professionnels du droit en Europe. Pourquoi l’Europe ? Parce que nos concurrents principaux, comme LexisNexis ou Karnov, sont tous internationaux. Pour devenir cet acteur européen de référence, nous devions donc regrouper nos marques et mettre en commun nos activités. À l’échelle de nos maisons d’édition, cela signifie que les entités locales implantées à l’international, telles que Giuffrè en Italie, SDU aux Pays-Bas, Larcier-Intersentia en Belgique et Luxembourg ou encore Juris/Stollfuß en Allemagne, vont désormais être estampillées du préfixe commun « Lefebvre » et collaborer ensemble. Il s’agit donc d’une simplification de notre identité, pour nos clients mais aussi en interne, et d’une mutualisation de nos expertises, notamment sur les critères ESG (Environnement, social, gouvernance) et sur les questions liées à l’intelligence artificielle.

Anne-Laure Chaumeil : Nous souhaitons que l’ensemble de ces entités locales travaillent à des synergies qui doivent pouvoir asseoir notre présence. Sur des matières qui ont une vocation européenne telles que l’ESG, l’idée n’est donc plus de développer une offre de contenus ou de services pays par pays, mais d’utiliser l’intelligence collective des éditeurs du groupe, par exemple, pour construire une offre qui puisse être commercialisée sur l’ensemble des territoires.

Une refonte visuelle

Il est également question d’une refonte de la charte graphique du groupe...

P.G. : La charte graphique a été revisitée pour porter notre ambition et nos valeurs redéfinies. Notre entrée dans l’ère digitale, par exemple, est illustrée par un visuel simplifié. Nous souhaitions aussi véhiculer une image moins institutionnelle, plus proche de la clientèle, moderne et dynamique. L’identité visuelle du groupe est désormais définie par une marque noire et blanche, symbole de notre caractère « premium ». Concernant notre logo, nous maintenons le double « L » de Dalloz et de Francis Lefebvre. En revanche, ces deux lettres sont désormais encadrées par un trapèze, qui témoigne de notre ambition européenne.

Code rouge/Groupe Lefebvre
Pour son édition 2025, l'incontournable code napoléonien sera désormais estampillé "Lefebvre Dalloz".- Photo GROUPE LEFEBVRE

Ces modifications auront-elles un impact sur la publication des ouvrages ?

A.C. : La charte graphique ne va pas amener de modifications substantielles à nos ouvrages. Nos couvertures, par exemple, sont très liées à des principes de la collection et ne vont pas connaître de changements majeurs. Néanmoins, les codes Dalloz, jusque-là estampillés par les logos « Dalloz »et « Lefebvre Dalloz », nom de la marque ombrelle que nous avons créée en 2021 et réunissant nos trois maisons d’édition emblématiques, vont simplement être cachetés « Lefebvre Dalloz ». Il en est de même pour les Mementos, qui jusque-là, étaient désignés sous le logo des éditions Francis Lefebvre. Cette modification s’appliquera à l’ensemble de nos revues et nouveautés à paraître d’ici à fin juin. Mais nos ouvrages continueront de porter le copyright des maisons d’édition et les équipes d’éditeurs, comme les auteurs, restent inchangées.

« Le livre n’a pas du tout la même vocation que l’IA »

Début 2024, vous lanciez votre propre modèle d’intelligence artificielle juridique, GenIA-L. Dernièrement, vous annonciez vouloir intensifier le développement de la technologie dans vos services. Un choix qui peut surprendre tant l’IA suscite l’inquiétude de toute la filière du livre.

A.C. : Nous savons que nos partenaires du livre s’interrogent sur l’avenir du livre dans un environnement de plus en plus technologique et où la consommation d’informations par l’IA s'accélère. Le livre n’a pas du tout la même vocation que l’IA. Aujourd’hui, celle-ci vient augmenter l’expérience de nos bases documentaires et faciliter la recherche d’information dans le cadre des missions des professionnels et praticiens de droit, qui sont d’ailleurs soumis aux réglementations en vigueur. De son côté, le livre a une vocation d’apprentissage et reste le support privilégié par les étudiants. Chaque année, nous vendons environ 600 000 parutions chez Lefebvre Dalloz, dont 110 000 exemplaires de codes rouges. Notre librairie, rue Soufflot, a également fait l’objet de travaux de rénovation, ce qui traduit bien notre souhait de faire vivre le rayon « droit » dans le réseau de librairies françaises. Nous souhaitons également soutenir l’implantation ou la réimplantation d’un linéaire « droit » dans les librairies généralistes, avec le lancement d’une labellisation en collaboration avec Interforum. Dans ce cadre, nous proposerons aux libraires de se former à la thématique et à l’univers Lefebvre Dalloz pour que la clientèle professionnelle puisse trouver à proximité une offre qui l’intéresse. 

P.G. : Une bonne utilisation de l’IA suppose une culture juridique forte et notre modèle d’intelligence artificielle s’entraîne uniquement sur nos contenus, donc sur du droit commenté par nos rédacteurs et éditorialisé par des professionnels du livre. Nous ne ferons aucun compromis sur cette qualité de contenu. Néanmoins, nous croyons en l’Europe et nous souhaitons l’aider à asseoir sa souveraineté en termes d’intelligence artificielle. La technologie doit pouvoir stimuler la créativité de l’humain, et non le remplacer.

Là aussi, l’ambition du groupe est européenne ?

P.G. : La structuration commune de notre marque vise en effet à déployer notre IA dans chaque pays, avec un droit qui reste local et une application soumise à des lois européennes. C’est d’ailleurs ce qui nous distingue de nos concurrents américains et anglo-saxons qui, eux, ont fait le choix de vendre leurs contenus. De notre côté, nous défendons le droit européen, différent de la « Common Law » (droit commun), mais aussi l’État de droit comme pilier de la démocratie. Nous sommes d’ailleurs convaincus que le droit n’est pas une contrainte, mais qu’il est une chance de garantir notre sécurité.

A.C. : Le socle de la « compliance » (terme juridique pour désigner l’ensemble des processus mis en œuvre au sein d'une structure pour assurer le respect des règles, des normes ou de l'éthique qui s'imposent à celle-ci, ndlr) est parfois perçu comme contraignant, notamment en raison de la complexité du cadre réglementaire. Pourtant, dans un environnement concurrentiel exigeant, il représente un atout stratégique pour les entreprises européennes, en leur permettant de se différencier. Chez Lefebvre Dalloz, nous accompagnons cette appropriation, en facilitant l’accès à des contenus fiables et en proposant des outils adaptés. Cela reflète notre conviction qu’une approche éthique est non seulement possible, mais souhaitable, tant dans les relations d’affaires que dans l’exercice quotidien de l’activité. C’est tout le sens du projet porté par le groupe Lefebvre – un projet qui va encore s’amplifier avec l’IA, en permettant de mieux valoriser nos contenus à l’échelle européenne. 

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