Décès de l'ex-ministre de la Culture et écrivain Frédéric Mitterrand
Ancien ministre de la Culture, homme de lettres et de télévision, Frédéric Mitterrand est décédé jeudi 21 mars à son domicile parisien à l'âge de 76 ans, après une lutte de plusieurs mois contre un cancer agressif. Retour, en livres et en émissions de télé, sur l'itinéraire d'un faux dandy à la "mauvaise vie", comme le voulait le titre de son autobiographie à scandale parue chez Robert Laffont en 2005.
Par
Pierre Georges Créé le
21.03.2024
à 20h53, Mis à jour le 22.03.2024 à 09h27
Ancien ministre de la Culture et homme de lettres et de télévision, Frédéric Mitterrand est décédé jeudi 21 mars à son domicile parisien à l'âge de 76 ans, après une lutte de "plusieurs mois contre un cancer agressif", a annoncé sa famille à l'AFP.
Neveu de l'ancien président François Mitterrand, ministre lorsque Nicolas Sarkozy était chef de l'Etat, cette personnalité inclassable, écrivain prolifique et à l'œuvre protéiforme, avait annoncé en avril 2023 être "malade", sans en dire davantage.
Évoquant son "immense tristesse", Nicolas Sarkozy a rendu hommage sur X à "un homme profondément cultivé et délicat, un être à part, sensible et attachant, une personnalité inclassable si loin de la vie partisane".
"Il fut un ministre de la Culture enthousiaste et passionné, qui exerça ses fonctions avec panache et talent. Il laissera ses films, ses livres, ses émissions comme autant de témoignages de son amour pour l'art et pour la culture", a-t-il ajouté.
"La mort de Frédéric Mitterrand me bouleverse. Une amitié de plus de 60 ans nous liait d'une affection inaltérable. Il a tout au long de sa vie servi les arts avec passion, érudition et amour. Notre fidélité commune pour François Mitterrand nous unissait profondément", a réagi de son côté Jack Lang, ancien ministre socialiste de la Culture, sur le même réseau social.
L'homme aux 100 livres
Également écrivain, Frédéric Mitterrand n'hésitait pas à confesser sa "mauvaise vie". Il a ainsi fait le récit en 2005, dans une autobiographie célèbre publiée chez Robert Laffont, de ses errances sexuelles et tarifées en Thaïlande et au Maghreb. D'abord salué, le livre suscitera ensuite la polémique, l'obligeant à se défendre de toute relation avec des mineurs ou d'apologie de la pédocriminalité.
Plus largement, l'homme fut un écrivain prolifique, ayant écrit ou participé à plus d'une centaine d'ouvrages (voir encadré).
En 2019, il avait été nommé (provisoirement) directeur éditorial des éditions Christian Bourgois, peu après la prise de contrôle de la famille Mitterrand sur la maison d'édition. Une nomination qui avait fait grincer des dents le petit monde germanopratin, évoquant un "putsch des Mitterrand" et un directeur éditorial nommé "sans jamais avoir été éditeur".
"J’ai 71 ans et je n’ai pas la compétence pour faire ce travail [d'éditeur] de 9 heures à minuit, expliquait alors Frédéric Mitterrand. Ce qui compte, c’est de remettre la maison en marche : rassurer les auteurs, constituer une équipe capable de comprendre le legs de cette entreprise et la renouveler avec doigté ».
Frédéric Mitterrand en livres
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Cinéphilie et lecture à voix haute
Né le 21 août 1947 dans les beaux quartiers à Paris, Frédéric Mitterrand a d'abord été professeur, avant de lancer des cinémas d'art et d'essai dont le plus célèbre l'Olympic-Entrepôt ouvre en 1975 dans le quatorzième arrondissement de Paris.
Il s'est ensuite s'est fait un nom grâce à la télévision. "Etoiles et toiles" est le nom de la première émission qu'il anime sur la Une à partir de 1981 : il y ressuscite avec flamboyance les stars, surtout les actrices, et décortique les grands films. L'homme insuffle sa cinéphilie au spectateur, captivé par cette voix lancinante, au phrasé reconnaissable entre tous. Quelques années plus tard, il quitte TF1, devenue chaîne privée, pour Antenne 2 et le service public.
Il est également apparu sur l'écran enfant : à 13 ans, il joue le fils de Michèle Morgan dans Fortunat, avec Bourvil (1960). Il passe aussi derrière la caméra et réalise notamment Lettres d'amour en Somalie (1981), écrit à la première personne, et l'opéra "Madame Butterfly", filmé en Tunisie (1995).
Plus récemment, en 2018, il était pour la première fois monté sur les planches, au Studio Marigny, pour lire ses propres textes à voix hautes. "J’aime lire à haute voix. La lecture est un plaisir silencieux, la faire partager à un auditoire est une aventure […]. Ce qui conduit à vouloir le faire partager en lisant à haute voix et en public, c’est aussi l’émotion qu’il nous procure. Ce que je voudrais réussir: lire mes textes sur une scène de théâtre pour obtenir qu’on les entende, sans regret ni remords", confiait alors l'auteur d'une vingtaine de romans (voir encadré).
Frédéric Mitterrand- Photo PHOTO OLIVIER DION
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De la Villa Médicis à la rue de Valois
Malgré son nom, il refuse de marcher sur les traces d'un oncle qu'il admire. Il adhère en juin 1993 au Mouvement des radicaux de gauche (MRG). En mai 1995, il apporte son soutien à Jacques Chirac, candidat à la présidence.
Nommé à la tête de la Villa Médicis à Rome par le président Nicolas Sarkozy en 2008, il rentre à Paris quelques mois plus tard pour prendre le ministère de la Culture, jusqu'à l'élection présidentielle de 2012, perdue par la droite.
À ce poste, ce père de trois enfants a notamment affronté les intermittents du spectacle, fait adopter la loi Hadopi et conduit des grands chantiers, lancés pour certains avant son arrivée : le Mucem à Marseille ou la Philharmonie à Paris.
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