Fin juin 1967, "aux heures basses de la nuit", une "Buick Electra 225 bleu métallisé, modèle 66", s'encastre sous un semi-remorque sur la route US 90 qui relie la ville de Biloxi à La Nouvelle-Orléans. A l'intérieur de l'épave, les secours découvrent trois adultes décédés et trois enfants survivants. Vera Jane Ottaviano ou Vera Jane Hargitay, plus connue sous le nom de Jane Mansfield, voyageait ce jour-là avec son amant Samuel Brody, avocat qui avait défendu Jack Ruby et quitté pour elle son épouse atteinte de sclérose en plaques ; ses enfants ; quatre chihuahuas et sept perruques de femmes.
L'ex-Miss Freeway née sous le signe du Bélier et élevée sévèrement par une mère institutrice presbytérienne avait perdu le statut de vedette qu'elle avait à ses débuts. Un peu has been, elle se négligeait, forçait sur l'alcool et les médicaments, enchaînait les galas et les esclandres, les parades et les strip-teases, mais gagnait encore très correctement sa vie... Parfaitement documenté sur un sujet qui lui va comme un gant, Simon Liberati dissèque le crash et la carrière de l'actrice et vamp blonde avec une minutie chirurgicale.
L'auteur de Nada Exist (Flammarion 2007, repris en J'ai lu) nous la montre sur le point d'être exclue du neuvième San Francisco Film Festival ou bien rendant visite à un gourou sataniste, Anton LaVey, dans sa Black House. Liberati dose ici habilement le glamour, le kitsch et le trash. Il est d'évidence à son meilleur face à un sujet comme la rusée et dure en affaire Jane Mansfield. Pour lui, celle-ci était tout à la fois "symbole de l'ancien Hollywood, créature de Frankenstein lancée par la régie publicitaire de la Fox contre Marilyn Monroe, un simple buste, une paire de seins qui poussait l'arrogance jusqu'à n'avoir jamais tourné de film correct, un monstre engendré par la presse poubelle et le néant des vieux studios poussiéreux".