Printemps 1984, Paris rive gauche. Colombe Schneck a 17 ans. Elle est légère, d’une légèreté qui confine au bonheur. C’est "une adolescente qui lit tout le temps, ne fume pas, ne boit pas d’alcool, se couche tôt, mange des fruits et des légumes, cuisine des pizzas et des gâteaux au chocolat pour ses amis, porte des chemises en Liberty de chez Cacharel". C’est aussi une fille qui découvre le désir et les garçons et va en payer le prix le plus fort, celui d’un adieu à l’enfance, d’une grossesse non désirée, d’un avortement.
Depuis son premier livre, L’increvable Monsieur Schneck (Stock, 2006), Colombe Schneck maraude joliment aux confins du récit de soi. Avec Dix-sept ans, récit d’un IVG donc, de sa violence cristalline, de son oubli impossible, elle se montre cette fois-ci, en quelques pages seulement, au plus près d’elle-même. Curieux récit en vérité, né de sa lecture d’un autre, L’événement d’Annie Ernaux (Gallimard, 2000), grandi au fil du silence dont l’auteure a toujours entouré les faits qu’il relate et qui s’achève par une troublante et paradoxale adresse à cet enfant qui n’est pas né et n’en fut jamais un, errant seulement dans les limbes de sa mémoire… Au-delà de ce "secret derrière la porte", le livre est aussi un instantané d’époque et surtout, motif caché dans le tapis de sa narration, un magnifique chant d’amour de Colombe Schneck pour ses parents, et notamment pour son père (auquel il est dédié). On n’oubliera pas de sitôt ce père, médecin des beaux quartiers, bienveillant, cavaleur, libertaire et attentif dans le même temps, qui invite sa fille à la Closerie des lilas pour lui dire que tout est toujours possible et que la vie recommence chaque jour. Olivier Mony