Ses amis ont tendance à surnommer le héros et narrateur de ce roman, Aurélien Moreau, Harry Potter, sans doute à cause de sa frimousse, de son petit côté lunaire, et ça l'agace. Mais il fait avec. Son truc à lui, Auré, c'est la poésie. Il en écrit, de la belle et sentimentale, et il la met en musique, à la guitare, avec son pote Martin, son coloc, qui « est beau » et a entretenu un temps une idylle sexuelle avec Mathilde, tandis que l'autre demeurait puceau. Mais il se fera plaquer. On n'est pas forcément sérieux quand on a une vingtaine d'années. Aurélien en est persuadé : un jour, il sera une star, comme les Doors, ses idoles. Pas facile, lorsqu'on est natif de Cravoux, un bled non loin de Poitiers.

En attendant, Aurélien travaille le jour à l'Agence Funéraire Européenne, avec Patrick, le boss. Ce qui nous vaudra quelques descriptions, pince-sans-rire et vues de l'intérieur, des pratiques et rituels des pompes funèbres. Aucun détail ne nous étant épargné. La nuit, il complète son salaire chez McDo, ce qui lui permet de tomber petit à petit amoureux d'Assia, la manageuse. Auparavant, il y avait eu Sonia, sa copine depuis l'école primaire, mais ça n'avait pas été très loin. Il lui avait fallu attendre Mélanie, la fille d'un important éleveur de la région, pour se dépuceler. Mais avec Assia, c'est du sérieux. À la fin du livre, il la présente même à ses parents, Jean-No, patron de Piscine et Vérandas, et sa femme, qui est aussi sa secrétaire. Des braves gens sans histoire, qui ont vite renoncé à comprendre leur ado, tout en l'entourant d'affection. Et puis, depuis toujours, dans sa vie, il y a Jerem, le meilleur ami, le presque frère, celui des premières bêtises, des premières branlettes communes. Ils ont tout partagé, le brevet, le bac, les boums, l'alcool, le shit. Et Jerem s'est mis avec Sonia, devenue coiffeuse. Un soir, après une soirée où Aurélien n'était pas, il l'a raccompagnée chez elle, à moto, complètement défoncé. On imagine la suite...

Mêlant flash-back et présent, Pierre Guénard, lui-même leader et chanteur du groupe Radio Elvis, raconte cette histoire, peut-être en partie autobiographique, avec beaucoup de sensibilité, de tendresse, de pudeur et de nostalgie, dans une succession de saynètes souvent pittoresques. Il possède une bien belle plume, et une nouvelle corde à son arc.