Correspondant du Monde au Japon depuis des décennies, Philippe Pons a déjà consacré plusieurs ouvrages érudits à des sujets nippons complexes, forcément, dont l’art traditionnel du tatouage. Il en avait fait un livre, Peau de brocart, Le corps tatoué au Japon, paru au Seuil en 2000, qu’il a repris, refondu, augmenté, réactualisé aujourd’hui, où l’art ancestral du bunshin – « le corps écrit », parce que, à l’origine, à la fin du XVIe siècle, les tatoueurs étaient des graveurs qui s’inspiraient des estampes, y compris, plus tard, celles des plus grands maîtres, comme Utagawa Hiroshige, ou Hokusai – est à la fois en voie de disparition et de mondialisation, comme bien d’autres disciplines.
Comme tout au Japon, cet art a une longue histoire, alternant la lumière, à son apogée au début du XIXe siècle, et l’ostracisation sociale, en passant par l’interdiction totale, de 1872 à 1948, par les empereurs Meiji, pour des raisons d’ordre moral confucéen. Ce sont les GI américains qui contribueront à le ressusciter après la guerre, à le vulgariser aussi. Quant à son image, elle reste de nos jours associée aux prolétaires, aux gens de mauvaise vie, aux yakuza.
L’essai de Philippe Pons, à la fois historique et anthropologique, est remarquablement clair même quand ce qu’il explique est compliqué, les photos fascinantes, notamment de ces « peaux de brocart », le nom poétique du tatouage intégral.
Le corps tatoué au Japon : estampes sur la peau
Gallimard
Tirage: 4 000 ex.
Prix: 25 euros ; 160 p.
ISBN: 978-2-07-278655-6