Juillet 1925, macabre découverte dans le Port-Vieux de Biarritz. On retrouve, retenu par les pieds au palan d’un pêcheur, le corps nu et atrocement mutilé d’une jeune libraire de la ville, disparue depuis quelques jours. Noyade ou assassinat, les rumeurs vont bon train dans une ville qui est passée en quelques années seulement du statut de village accroché au-dessus de la mer à celui conservatoire des plaisirs plus ou moins licites d’une aristocratie issue des cours russe, espagnole et anglaise dont les mœurs apparaissent pour le moins dissolues.
Treize ans plus tard, à la demande d’un éditeur français de best-sellers guère scrupuleux, le romancier français Georges Miet reprend l’enquête et interroge tous ceux qui ont pu, à quelque titre que ce soit, y être mêlés. Bientôt, sa démarche l’amènera à rôder autour de la mystérieuse et fascinante villa Belza, folie gothique juchée sur les rochers à l’à-pic des flots. Son livre, recueil de ses entretiens, ne paraîtra que soixante-cinq ans après sa mort, d’abord publié par une obscure et érudite maison d’édition bordelaise, puis pour un plus large public, sous le titre de Cabaret Biarritz.
Deuxième roman de José C. Vales et premier traduit en français, Cabaret Biarritz a obtenu en Espagne un beau et inattendu succès, facilité par l’obtention du prix Nadal, le Goncourt de l’autre côté des Pyrénées. C’est un roman délicieusement piégé, allègre, noir et érudit à la fois, mise en abîme de la fascination de l’auteur pour ce monde de domestiques complaisants, de prêtres dévoyés, de têtes couronnées décadentes, ce monde où la folie, le sexe et la mort en un ballet macabre se confondent. Si ce ne sont les romans victoriens d’un François Rivière en France ou le délicieux Mapp et Lucia d’Edward Benson (justement traduit par Vales en espagnol), ce Cabaret Biarritz, par sa croyance joyeuse dans les sortilèges de la fiction, ne peut se comparer à rien de ce qui se publie par ailleurs. Cette singularité même est une définition possible de ce que doit être un bon roman. Olivier Mony