Même disparues, les civilisations continuent leur vie dans l'idée que nous nous en faisons. C'est le cas pour les Celtes, les Mayas ou les Étrusques auxquels Marie-Laurence Haack consacre ce livre éclairant. Cette grande spécialiste, professeure d'histoire ancienne à l'université Jules Verne de Picardie, a utilisé un système passé/présent, guidée par le souci d'expliquer la fascination qu'exerce toujours ce peuple à la langue et aux coutumes mystérieuses. Ainsi, elle aborde d'emblée l'Étrurie à travers la figure de l'écrivain britannique D. H. Lawrence qui leur consacra ses Promenades étrusques alors qu'il écrivait L'amant de lady Chatterley. Cette anecdote lui permet de développer les notions de symbolique sexuelle et de corps dans cette société inégalitaire qui cultivait le goût du luxe et du pouvoir. « En imaginant la vie et le comportement de sa lady Larthia, Lawrence s'inscrit dans une tradition littéraire qui remonte à l'Antiquité. Beaucoup d'écrivains contemporains des Étrusques ont en effet vu en eux des débauchés. » Mais difficile d'en savoir plus sur le sujet « car la littérature étrusque, excepté quelques passages de livres religieux, a disparu ».
Sur cette civilisation qui a brillé dans l'Italie antique du IXe au Ier siècle avant J.-C. entre la mer Tyrrhénienne, le Tibre et l'Arno, Marie-Laurence Haack ne se contente pas de distiller les connaissances. Elle revient sur la manière dont on a envisagé ce peuple au cours des siècles en faisant d'eux des dépravés, des anti-Romains dont les origines demeurent floues. Les Étrusques sont les conséquences de mouvements de peuples, d'expéditions et de navigations qui se sont déroulés entre le XIIIe et le XIe siècle avant J.-C. en Méditerranée. La conquête perse et l'hégémonie de Syracuse au Ve siècle avant J.-C. ne sont pas favorables à l'Étrurie, tout comme la reprise des hostilités avec Rome au IVe siècle avant J.-C.
De leur passage, il reste surtout l'artisanat et l'art qu'ils ont légués comme en témoignent les petits chevaux de Tarquinia si chers à Marguerite Duras. « Ils nous ont transmis un alphabet, le goût du vin, des instruments de musique et des images de banquets et de danses qui ne cessent de nous intriguer. » Avec leurs tombes construites comme des maisons avec plafond et fausse poutre centrale, ils ont laissé une empreinte durable sur l'Italie, notamment en Toscane. À ce propos Marie-Laurence Haack évoque Roberto Benigni et la ville d'Arezzo, ancienne cité étrusque, au centre de son film La vie est belle (1997). Reste que la fascination liée à leur origine mystérieuse est sans doute vaine. « Ce que nous appelons "étrusque" est une combinaison, à un moment donné, d'éléments indigènes et hétérogènes. » Mais même sans avoir résolu cette énigme, ce livre est important et possède de nombreuses qualités : le savoir, la clarté, le goût de la transmission dans un langage accessible. À tout point de vue, cette synthèse finement illustrée est un joli tour de force.
À la découverte des Étrusques
La Découverte
Tirage: 2 500 ex.
Prix: 23 € ; 350 p.
ISBN: 9782359251494