« Marave, c’est de la BD qui ose ». C’est en ces termes que les éditions Père Fouettard, fondées à Strasbourg en 2014 par Florent Grandin et Laura Derajinski, ont annoncé la création de leur nouvelle collection. Consacrée à la bande dessinée jeunesse, celle-ci ambitionne de proposer des histoires percutantes à raison de quatre titres par an. Elle s’ouvrira le 14 mai prochain sur deux premiers opus.

« Aujourd’hui, on noie les ados sous des contenus trop lisses, trop sages, trop formatés. On évite de les bousculer, de les défier, de leur parler franchement. Pourtant, ils ont soif de récits forts, de vrais enjeux, d’émotions brutes », observe la maison dans un communiqué. Pour lutter contre ces textes qui se retiennent d’exister, les éditions Père Fouettard entendent donc proposer aux enfants et aux adolescents « des histoires qui cognent, qui vibrent et qui leur ressemblent ».

« Je crois qu’il y a de la place pour des idées novatrices »

« Nous sommes partis de propositions émises par nos auteurs, qui pour certains, veulent désormais se mettre à faire de la BD », complète Florent Grandin auprès de Livres Hebdo. Interrogé sur la pertinence d’une nouvelle offre éditoriale sur un marché déjà foisonnant, le patron de la maison répond sans détours : « Le marché n’est pas saturé par la BD d’auteur, mais plutôt par des séries marquetées, des BD pensées comme des produits de consommation pour répondre à certaines attentes. Je crois qu’il y a de la place, en revanche, pour des idées novatrices. »

La nouvelle collection sera constituée de deux versants : l’imaginaire, pour conjuguer l’intensité de l’aventure et du merveilleux. Et l’humour, pour offrir des histoires mordantes et désopilantes. « La grande qualité de la BD jeunesse, c’est qu’il s’agit d’un genre passerelle par excellence. Elle peut donc toucher un public élargi », commente Florent Grandin, qui souhaite voir les albums passer entre une pluralité de mains.  

Une invitation à réfléchir

Plutôt adressé aux pré-adolescents, le premier titre imaginé par Adèle Tariel et Jérôme Peyrat, Peuple de plumes (tiré à 3 000 exemplaires), s’empare par exemple des codes dystopiques. Un procédé par lequel le récit questionne notre rapport à la science, à la technologie, mais évoque aussi la notion de ségrégation sociale ou encore la place des jeunes et des anciens dans nos sociétés. Le lecteur découvre ainsi Gloria, qui vit à l’abri dans son palais suspendu, tandis que dehors, le monde s’est noirci d’un écran de fumée polluée. Intriguée par cet univers en contrebas, la jeune fille l’observe depuis sa fenêtre, ignorant que d’autres êtres puissent s’y trouver. Jusqu’au jour où elle aperçoit un étrange garçon doté de plumes.

De son côté, Préanimal du Colombien Canizales (4 000 exemplaires) imagine les difficultés et les questionnements qui traversent les « préanimaux », ces adorables petites boules de poils pas tout à fait arrivées à terme. Car pour devenir de vraies bestioles, ces dernières doivent obtenir leur diplôme et trouver leur voie. Parmi elles, Pado, qui adore tous les animaux, s’interroge : comment savoir celui qui lui correspond le mieux ? Une histoire doucement naïve qui invite surtout à s’explorer et sonder les choix multiples, sans jamais s’enfermer dans un seul et même sillon.