15 SEPTEMBRE - HISTOIRE Allemagne

Historien de l'Antiquité, Karl-Wilhelm Weeber s'est spécialisé dans des sujets "marginaux" en apparence - comme l'humour -, mais qui constituent d'excellents révélateurs sur la mentalité de nos ancêtres. Lointains, certes, mais au fond pas si différents de nous. Au passage, Weeber tord le cou à quelques idées reçues, notamment à propos du système politique des Romains, plus moderne et moins monolithique que l'imagerie populaire l'a schématisé.

Weeber s'est donc consacré à l'étude minutieuse des quelque 3 000 dipinti électoraux retrouvés sur les murs de Pompéi, souvent le long des voies les plus passantes, comme la rue de l'Abondance. Ce ne sont point des graffitis, mais de belles inscriptions soignées, en capitales noires ou rouges, appelant à voter pour tel ou tel candidat, à la fonction d'édile ou à celle de duumvir, équivalents locaux des magistratures de Rome. Ces fonctions étaient collégiales et annuelles. Ce qui fait que les 2 000 municipes de l'Empire romain étaient en campagne à peu près non-stop !

Pour être efficaces, les inscriptions, faites pour une lecture rapide, sont truffées d'abréviations, et assez standards : y figurent le nom du candidat, le mandat qu'il brigue, parfois le nom du particulier ou de la corporation qui appelle à voter pour lui, et parfois aussi une appréciation convenue, du genre "c'est un jeune homme vertueux" ou encore "il gérera bien les affaires de la cité". Réalisées par des professionnels, les "agences de publicité" de l'époque, certaines sont même signées. Celle-ci, par exemple, qui porte le numéro 7418 : "Lucius Popidius Secundus édile ! Son client Lollius Synhodus demande de voter pour lui. C'est Papilio qui l'a écrit."

Il y a, bien sûr, l'émotion de voir et d'entendre vivre, dans leur quotidien, des êtres morts il y a deux mille ans dans les circonstances dramatiques que l'on sait.

Mais le petit essai passionnant de Weeber, qui donne à lire beaucoup de dipinti, rappelle aussi des vérités premières à propos du système politique romain, plus "démocratique" qu'il n'y paraît, même sous ce régime que l'on appelle "l'Empire", institué par Auguste (et non par Jules César).

Malgré un centralisme évident, Rome n'était pas tout l'Empire. A la capitale se géraient les affaires de l'Etat, les factions complotaient, les grands fauves se déchiraient, mais partout ailleurs la vie politique locale n'était pas moins intense. D'autant que le pouvoir, jusqu'à la fin, a toujours conservé les institutions d'origine, qui remontaient à la "République" : le Sénat, et le cursus honorum. Certes la "démocratie" romaine était censitaire, inégalitaire et partielle (ne pouvaient voter que les hommes, inscrits, libres et majeurs, possédant un seuil de revenus), et les lobbys existaient déjà, même féminins : on a ainsi retrouvé, à Pompéi, des dipinti commandés par... des serveuses d'auberges appelant à voter pour quelqu'un de leurs clients.

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