Le Salon du livre de Montréal a enregistré une hausse de la participation et des ventes (voir le bilan sur notre site Internet), et c’est tant mieux. Car depuis deux ans, comme le dit par euphémisme le nouveau président et chef de la direction de la branche détail et livres de Québecor Média, Donald Lizotte, «nous ne sommes pas dans une période de pleine croissance». Hors Hachette Canada, grâce aux succès de Lattès et d’Astérix, mais aussi du Livre de poche, de Delcourt ou de Glénat, et de Flammarion, porté par les ventes de la série Crossfire (J’ai lu) et de la chef québécoise Josée di Stasio, la plupart des diffuseurs affichent, à périmètre comparable, une activité stagnante ou en tassement.
«Le fonds souffre de la crise de la librairie », estime le directeur général de Flammarion Ltée, Guy Gougeon. «Les retours sont toujours très élevés», observe Christian Chevrier, directeur général d’Hachette Canada. «La vie des livres est plus courte», complète le directeur général de Dimedia, Serge Théroux. A défaut de morosité - «En Amérique, il y a toujours un fond d’optimisme», rappelle le directeur commercial d’ADP (Québecor), Stéphane Masquida -, il règne dans l’édition une certaine inquiétude.
La situation économique, plutôt bonne au Québec, n’est pas en cause. Comme le résume le directeur général du Boréal, Pascal Assathiany, le tassement de l’activité s’explique d’abord par «les changements technologiques, les nouvelles habitudes de consommation et de lecture et l’évolution du système éducatif». Même analyse du côté des libraires : «Le temps de lecture est réduit par la concurrence des nouvelles plateformes de divertissement sur ordinateurs, tablettes et téléphones intelligents, et la lecture de livres, dévalorisée, apparaît ringarde», selon Yvon Lachance, copropriétaire d’Olivieri (Montréal).«Le défi, c’est la conquête du temps des clients», confirme Donald Lizotte. Face à des jeunes de plus en plus sollicités par le Web et les jeux vidéo, il faut rendre le livre plus attrayant.» Pour la patronne du groupe Librex (Québecor), Johanne Gray, «auteurs et éditeurs n’ont rien perdu de leur créativité». Reste, selon la P-DG de Gallimard Canada, Florence Noyer, «à se rapprocher du terrain, aider les libraires à animer leur librairie». Pour leur part, les associations professionnelles, toutes favorables à une régulation du prix du livre, attendent que le gouvernement la mette en place. La question serait à l’ordre du jour du Conseil des ministres du 4 décembre. Fabrice Piault