Comment avez-vous choisi les personnes que vous vouliez avoir dans ce second volet ?
Un peu comme dans le premier livre, le choix s’est fait par un mélange d’évidence et de subjectivité. La femme puissante a une zone d’influence et se sent à sa place. Par exemple Christine Lagarde est la première femme présidente de la Banque Centrale Européenne, du Fonds Monétaire International et d’un grand cabinet d’avocat américain. Je suis également allée chercher des profils moins connus comme la colonelle de gendarmerie, Karine Lejeune.
Les femmes citées, plus ou moins connues, ont toutes une carrière professionnelle impressionnante. Est-ce là un critère de puissance pour une femme ?
La puissance, toutes les femmes l’ont. Une chef d’entreprise ou une femme qui occupe, comme on dit, un métier de première ligne possède de l’influence. Dans l’histoire, l’art ou la politique, nous souffrons d'une représentation très masculine. Nous cherchons tous le moment où l’on sait que nous sommes à notre place. C’est là, pour moi, la vraie définition de la puissance. Il faut montrer les chemins pour y arriver. Je veux revendiquer des modèles féminins. Pour cette raison, il n’y a pas beaucoup de jeunes femmes dans l’ouvrage. Quand nous sommes jeunes, nous sommes plus souvent assaillis par le doute.
Parmi les modèles féminins que vous revendiquez, se trouve Anne Hidalgo, candidate à la présidentielle 2022…
L’échange avec Anne Hidalgo a eu lieu avant qu’elle ne se déclare candidate à la présidentielle. Elle est maire d’une grande ville, citée en 2020 dans les 100 personnalités les plus influentes… Qu’elle soit candidate à l’élection conforte cette image de femme puissante.
Peu de femmes vous disent, de prime abord, qu'elles se sentent puissantes. Certaines évoquent la connotation masculine voire péjorative de ce terme. Comment l’expliquez-vous ?
C’est la chose qui m’amuse le plus. Presque à chaque fois, quand je pose la question de la puissance, il y a un malaise, comme un mouvement de recul. Le mot est clivant aujourd’hui, encore plus lorsque l’on est une femme. Loin de l’image de pouvoir auquel le terme est associé, au fil de l’entretien la puissance est redéfinie comme quelque chose qui est de l’ordre de l’intérieur. Une fois le scepticisme passé, quasiment toutes admettent être aller vers ce chemin et assume le fait d'avoir de l'ambition.
Vous avez dit au sujet de ce deuxième volet : "cette série est différente de la première, peut-être plus profonde encore." Que voulez-vous dire par là ?
J’aborde des thèmes moins présents dans le premier et qui sont toujours tabous en 2021. Il y a la question d’avoir des enfants ou non, mais également le rapport à la vieillesse ou à la sexualité quand on a 70 ans. J’ai voulu montrer de nouveaux visages et soulever de nouvelles questions.
Le premier volume s’est vendu à près de 120000 exemplaires, vous attendiez-vous à un tel succès ?
Je ne m’y attendais vraiment pas. Au départ, j’ai été approchée par plusieurs maisons d’édition pour retranscrire l’émission en livre, mais je ne voulais pas imprimer. Je n’étais pas sûr que des gens seraient intéressés pour acheter un livre à 20 euros au lieu de l'écouter en podcast. Puis, j’ai rencontré Laurent Beccaria (Les Arènes) qui m'a convaincu. Il m’a dit : "tu mets ces femmes à nu, tu dois en faire autant et écrire une préface". Je ne sais pas vraiment écrire, je suis plus dans l’oralité : mon média c’est la radio. Le succès de Femmes Puissantes est ma plus grande fierté dans ma vie. Une espèce de communauté s’est créée. Dans cet espace là, il y a beaucoup de sincérité de la part des femmes interviewées et de ma part également. Je casse l'armure de la journaliste politique.
Une saison 3 de "Femmes puissantes" est-elle programmée sur France Inter ?
Pour l’instant, ce n’est pas prévu. Après la présidentielle, j’aurais peut-être envie de me relancer dans une saison pour la période estivale.