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Le Projet de Loi numérique se concentre sur la circulation, la protection et l'accès des données

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Le Projet de Loi numérique se concentre sur la circulation, la protection et l'accès des données

Manuel Valls et Axelle Lemaire ont dévoilé samedi 26 septembre le projet de loi numérique attendu depuis 2012. Un dispositif inédit permet aux internautes d'amender les articles ou d'en proposer d'autres avant la présentation du texte définitif au Conseil des ministres, vraisemblablement en novembre.

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Par Vincy Thomas
Créé le 26.09.2015 à 16h07 ,
Mis à jour le 28.09.2015 à 12h00

Samedi 26 septembre dans la matinée, le Premier ministre Manuel Valls et la secrétaire d’Etat chargée du numérique, Axelle Lemaire, ont présenté le projet de loi numérique attendu depuis trois ans, lancé par Fleur Pellerin à l’époque où elle était ministre déléguée à l’Economie numérique.
 
Discussion publique ouverte et interactive en ligne
 
Le texte du projet de loi « pour une république numérique » n’est pas encore définitif. Sa présentation samedi sert de préalable au lancement d’une vaste campagne de participation citoyenne à travers une plateforme de contribution en ligne. Les internautes ont trois semaines pour proposer des articles et des amendements. "Les contributions ayant reçu le plus de votes des internautes auront la garantie d’obtenir une réponse officielle du gouvernement. Parmi elles, les trois contributions les plus populaires verront leurs auteurs reçus par la secrétaire d’Etat chargée du numérique, afin de pouvoir lui exposer en détail leurs propositions" explique le site gouvernemental. "C’est un dispositif inédit et expérimental en Europe et sans doute même dans le monde à ce niveau", a insisté Axelle Lemaire lors de la présentation du projet.
 
Une loi délestée de quelques chapitres
 
Le "domaine public volontaire" - la possibilité de verser une œuvre au domaine public avant l'expiration d'un droit de propriété intellectuelle et des exceptions au droit d’auteur pour autoriser la fouille de textes et de données à des fins de recherche ou encore la possibilité de reproduire des œuvres placées dans le domaine public dans un but non commercial ("droit de panorama") - ont disparu du texte. La Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) comme le Syndicat national de l'édition (SNE) avaient vivement réagi à ces propositions qui, selon elles, visaient à faire du droit d’auteur une exception.

D’un point de vue plus global, le projet de loi s’est recentré sur trois grands thèmes, se délestant de nombreux objectifs initiaux comme le financement de start-up, qui seront sans doute traités à l’occasion d’une loi sur l’économie numérique portée par Emmanuel Macron, ministre de l’Economie.

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Droit au maintien à la connexion

S’inspirant du rapport remis par le Conseil national du numérique (CNNum) en juin au Premier ministre, et des préconisations du Conseil d’Etat dans son étude annuelle sur le numérique et les droits fondamentaux, le projet se divise en trois chapitres : "La circulation des données et du savoir”, “La protection des données numériques” et “L’accès au numérique”.  

En actant le maintien de la connexion pour les foyers en grande difficulté financière, le projet de loi inscrit l’accès à Internet dans les droits universels, à l’instar de l’eau, de l’énergie ou du téléphone. Les foyers concernés pourront bénéficier de l’aide financière d’un fonds de solidarité universel et leur connexion sera maintenue par leur fournisseur d’accès le temps de l’instruction de leur demande d’aide.
 
Open Data
 
L’open data est au cœur du projet en posant comme principe par défaut la diffusion des données produites par les administrations (sauf celles concernant la sécurité publique, la défense et la vie privée), par les établissements publics industriels comme la Sncf et par les délégations de service public.
 
Le projet de loi définit aussi un “domaine commun informationnel”, qui recouvre les documents publics, les œuvres passées dans le domaine public et tout ce qui ne peut pas être un droit de propriété intellectuelle. Il s’agit d’empêcher les appropriations abusives mais aussi de faciliter le partage d’information. Par exemple, le projet incite les scientifiques, dont la recherche est financée "à plus de 50 % par des subventions", à diffuser gratuitement leurs travaux même s’ils ont été publiés par un éditeur (après un an pour les sciences et deux ans pour les sciences humaines). Pour les bibliothèques universitaires, ce serait une bouffée d’oxygène dans un contexte où les abonnements aux grandes revues scientifiques sont devenus très coûteux.

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Neutralité, portabilité et confidentialité

Deuxième grand axe : la neutralité de l’Internet. Le projet de loi veut garantir un traitement égalitaire et sans discrimination de l’accès aux sites web. Concrètement, les opérateurs ne pourront pas proposer un Internet moins rapide à certains clients et un débit plus rapide à d'autres. L’ARCEP sera chargée de veiller au respect de ce principe.
"Le gouvernement souhaite, en proposant que le terme figure dans le projet de loi soumis à consultation, lancer le débat sur la neutralité du Net. Nous marquons ainsi notre volonté d’avancer sur ce projet , alors que ce principe n'est pas cité nommément dans le projet de règlement européen faute de position commune entre les différents les pays membres sur le sujet", a déclaré Axelle Lemaire lors de la conférence à Matignon.
Si le principe de neutralité est voté, un YouTube ou un Facebook n’aura pas de privilèges de bande passante par rapport au site d’un éditeur, d’un libraire ou d’une manifestation culturelle.

Par ailleurs, les internautes auront plus de droits, comme celui de récupérer les contenus en ligne dont il est le propriétaire (y compris sur un réseau social). Les prestataires de courriers électroniques seront désormais tenus de permettre la migration des courriels et listes de contacts d’un utilisateur quand il souhaite changer de service. De même les courriels seront aussi confidentiels qu’une lettre physique, et ne pourront pas être analysés par un service de courriel, sauf pour détecter des pourriels (spams) ou des virus.

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Droit à l’oubli, transparence et handicap

Le droit à l’oubli, permettant l’effacement des données personnelles, est accompagné de la possibilité d’avoir un testament numérique, qui autorise un tiers à accéder aux données d’une personne décédée. Pour les mineurs, cela permettra par exemple de demander la suppression de photos de vacances ou de soirées, qui peuvent nuire pour trouver un stage ou un emploi.

Par ailleurs, les sites qui publient des avis de consommateurs devront afficher plus de transparence sur leur système de modération et de vérification. Le consommateur pourra ainsi évaluer le degré de crédibilité des avis disponibles en ligne. Le texte aborde également la reconnaissance juridique du recommandé électronique et encourage le paiement par SMS. Il pourra obliger, sous peine de sanctions financières, toute administration, service public ou grande entreprise de mettre à disposition des sites Internet pour les personnes en situation de handicap.

Enfin, le projet de loi prévoit un renforcement des prérogatives de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), qui pourra désormais être consultée sur les propositions de loi parlementaires et devra soutenir «le développement des technologies respectueuses de la vie privée».
 
Le texte devrait être présenté dans sa version finale devant le conseil des ministres en novembre, selon la secrétaire d’Etat qui espère un examen "début 2016" par l'Assemblée nationale.
 

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