Plus 29 % en nombre d’exemplaires vendus et + 24 % en valeur : le bond en avant du livre numérique en France en 2015 est spectaculaire par rapport au rythme de croissance des ventes de livres imprimés, d’après les données GFK. Il n’a toutefois rien d’extraordinaire comparé aux progressions à trois chiffres qui ont caractérisé le démarrage des ventes d’ebooks aux Etats-Unis et au Royaume-Uni il y a quelques années. En France, "le chiffre d’affaires a atteint 79,1 millions d’euros, pour 10,7 millions de fichiers téléchargés", estime Sébastien Rouault, chef de groupe Panel Livre chez GFK. Faute de coopération des principaux revendeurs, l’institut procède à des extrapolations à partir d’échanges avec les distributeurs, pour les seules ventes de fichiers téléchargés, hors marchés publics (revues STM) ou professionnels (bases de données juridiques).
La progression très maîtrisée des ventes correspond à la volonté des éditeurs, manifestée par leur politique de prix. Ceux-ci sont inférieurs en moyenne de 30 % à ceux des grands formats papier, et supérieurs de 20 % à ceux des poches. "Les éditeurs ont vu ce qui s’est passé dans d’autres pays, ou dans d’autres secteurs, et ont su se faire entendre pour obtenir une réglementation qui leur permet de réguler assez finement ce marché", juge le responsable livre de GFK. "Nous ne favorisons pas, nous ne freinons pas, nous accompagnons ce nouveau canal de vente", résume Alexis Esménard, directeur du développement numérique d’Albin Michel. Dans cette maison, le numérique est resté quasi stable en 2015 en chiffre d’affaires (+ 0,3 %, 3,2 millions d’euros à fin novembre), et a progressé de 3,3 % en volumes.
Très modeste, la part du numérique en France s’inscrit désormais à 1,9 % en valeur et à 2,9 % en nombre d’exemplaires vendus. Cette situation s’explique par un effet d’offre : le catalogue est limité à la littérature générale et à la BD. A périmètre comparable, les ventes numériques dans ces segments représentent au moins 5 % du marché, et souvent le double en littérature de genre, SF, érotique ou sentimental. Le prix moyen continue de baisser, à 7,40 euros, contre 8,50 euros en 2013, mais il reste supérieur au niveau de 5 à 6 euros, que les lecteurs interrogés trouvent plus légitime. Hervé Hugueny