Il aurait volontiers magnétisé toute l'Europe. Sauf que son « fluide animal » était perçu comme le côté obscur des Lumières, c'est-à-dire l'irruption de l'incompréhensible dans le rationnel. Dans les salons parisiens, il est copieusement moqué par les écrivains qui ne voient en lui qu'un charlatan. En revanche, Versailles lui déroule le tapis rouge lorsqu'il vient soigner Marie-Antoinette.

Sous la forme d'un roman épistolaire, Frédéric Gros revient sur le destin peu commun de ce médecin autrichien prétendument porteur de pouvoirs thaumaturges, qui fascina autant qu'il agaça. Franz Anton Mesmer (1734-1815) affirmait avoir découvert le « magnétisme animal ». Pour lui, tous les êtres « rayonnaient ». Contrôler ce rayonnement conduisait à la guérison de tous les maux. 

Frédéric Gros nous montre ce docteur aimant avec son baquet, sa limaille de fer et ces femmes convulsives avec lesquelles il couchait pour accélérer le processus. Ce philosophe, auteur deDésobéir(Albin Michel, 2017, plus de 15 000 exemplaires selon GFK), éditeur de Michel Foucault dans la « Pléiade », dévoile un Mesmer aigri, regrettant que les bienfaits de sa thérapie n'aient pas été reconnus par le corps médical. Son roman met surtout en évidence les rapports entre le fluide corporel et la musique. C'est peut-être la clef de la vie de ce curieux magnétiseur qui n'avait pas compris la puissance érotique de sa thérapie, ouvrant la voie à la psychanalyse.