Choisi pour inaugurer la Foire internationale du livre de Guadalajara (FIL), qui se déroule jusqu'au 5 décembre au Mexique, Jean-Marie Gustave Le Clézio a fait salle comble.

Plus de 400 personnes, tous âges confondus, sont venues écouter dimanche le prix Nobel de littérature 2008 disserter sur la littérature interculturelle au côté de son ami l'historien Jean Meyer.

Pendant une heure et demie, l'écrivain mauricien, très à l'aise dans la langue de Cervantes, s'est départi de sa retenue habituelle pour donner au public une analyse profonde de la notion d'interculturalité et des difficultés que les sociétés rencontrent à faire cohabiter pacifiquement des cultures différentes.

Très attaché au Mexique, l'écrivain, qui prépare un essai sur Juana Inès de la Cruz, Luis Gonzales et Juan Rulfo, s'est déclaré touché d'avoir été invité à la foire du livre qu'il considère comme “un moment très important pour la culture mondiale. Elle a un rôle capital : permettre la diffusion des livres à une époque où le livre est devenu un objet archaïque et dont l'influence se réduit chaque jour au profit de celle des médias audiovisuels.”

Interrogé par la presse sur les problèmes de violence et de corruption qui gangrènent le Mexique, J.-M. G. Le Clézio s'est dit attristé mais confiant : “Il y a vraiment un problème de sécurité, mais je crois qu'il y a avant tout une certaine appréhension de la violence. Mexico est aujourd'hui en train de lutter de manière intense contre cette peur et ce manque de confiance. Je pense que c'est un combat que le pays va gagner car ce n'est pas possible de vivre comme ça.”

Monstres littéraires et stars

Véritable rendez-vous littéraire mondial, la FIL accueillait également ce week-end la Mexicaine Margo Glantz, couronnée cette année par le prix de littérature en langues romanes, ainsi que Philip Giordano, lauréat du prix international d'illustration de la Foire de Bologne 2010.

A noter cependant l'absence de Carlos Fuentes, retenu par les problèmes de santé de sa femme. L'écrivain mexicain devait présenter son nouveau roman Vlad, une histoire de vampires. C'est l'auteur Xavier Velasco, dépêché par Fuentes lui-même qui s'en est chargé, accompagné dans sa tâche par le cinéaste et “vampirologue” Guillermo del Toro. Ce dernier, venu également pour son dernier livre, Oscura, a rassemblé une foule de fans à la limite de l'hystérie.

Des succès de fréquentation dont s'est félicitée Nubia Macías, la directrice de la FIL, qui souhaite que Guadalajara reste un rendez-vous à la fois professionnel et grand public : “La venue d'auteurs est indissociable des négociations de droits. La dimension culturelle est une particularité de notre manifestation, nous voulons la garder car c'est en rencontrant ceux qui écrivent les livres que nous avons envie de les lire et de les traduire.”

Nubia Macías aimerait ainsi voir “plus d'auteurs français venir à la FIL” et convier la France comme invitée d'honneur dans les prochaines années. Elle déplore que pour les Mexicains, les écrivains français “soient presque devenus exotiques et que la plupart des titres français lus au Mexique ne soient que des best-sellers.”

Peu nombreux sur la foire, les Français comptent sur les journées professionnelles qui se déroulent aujourd'hui et demain pour renforcer leurs liens avec les éditeurs mexicains.

Dans cette optique, Hachette Jeunesse a fait le déplacement à Guadalajara, avec un objectif bien précis : “Prospecter et commencer à construire des ponts avec les éditeurs jeunesse”, a expliqué Mathilde Jablonski, la responsable des droits étrangers.

Pour Anne-Solange Noble, directrice des droits étrangers chez Gallimard, “ce moment est très important pour le négoce. Nous sommes des peuples latins, nous avons particulièrement besoin de nous voir pour que nos relations s'épanouissent.”