Istanbul n'est pas une ville comme les autres. C'est une cité - phare qui a attiré et éclairé les civilisations durant des siècles, mais c'est aussi une cité en perpétuel mouvement, un lieu de passage où le mot cosmopolite prend tout son sens. Dans la lignée du Jérusalem de Simon Sebag Montefiore (Calmann-Lévy, 2011, 38 000 exemplaires toutes éditions confondues selon GFK) Bettany Hughes (King's College de Londres) s'est lancée dans la biographie de celle qui fut appelée Byzance, Constantinople et Istanbul.
Au terme d'un travail de dix ans, elle déroule le fil du temps comme un documentaire, une technique qu'elle connaît bien puisqu'elle réalise des émissions d'histoire pour la télévision et la radio britanniques. Nous sommes donc dans la narrative non-fiction, cette manière de raconter le passé au présent, et nous sommes à Istanbul, la ville aux trois noms au carrefour des prières et des désirs, sur ce territoire aux sept collines baigné par la Corne d'Or, le Bosphore et la mer de Marmara.
De l'âge de bronze à la Turquie moderne, dans près de 80 courts chapitres rythmés comme des épisodes d'une grande saga, l'historienne rappelle les métamorphoses religieuses, culturelles, ethniques et architecturales d'une mégalopole forgée par les Stambouliotes. C'est en effet moins ce qui est dit que la manière de le dire. Bettany Hughes a puisé dans une documentation considérable d'où elle a tiré quantité de faits, anecdotes et croquis quotidiens.
Au Ve siècle avant J.-C., la cité est déjà l'objet de toutes les convoitises. Alcibiade la prend, par ruse ou par force, on ne sait. Elle devient la ville des plaisirs et des ivrognes. Pas étonnant que la cité se place alors sous la tutelle de la tourmenteuse déesse Hécate. Elle est alors représentée sur une pièce par les symboles du croissant de lune et de l'étoile, plusieurs siècles avant l'avènement de l'islam.
Pour bien nous faire comprendre les mutations d'une capitale où les légendes enrobent constamment la réalité, Bettany Hughes propose des cartes, des illustrations et des photographies qui aident à se repérer dans la Nouvelle Rome de Constantin, la reine des villes à partir de laquelle l'Empire envisage d'étendre la colonisation des territoires à celles des esprits. Puis vient la conquête par les musulmans de celle qui était restée comme « un os dans la gorge d'Allah ».
En 1915, la veille des débarquements alliés sur les plages de Gallipoli, le « dimanche rouge », une rafle de l'élite intellectuelle arménienne à Istanbul annonce le génocide. Des années plus tard Mustafa Kemal quitte Istanbul pour Ankara. Il a compris que la Sublime Porte n'ouvrait plus sur rien. Mais elle reste le lieu fascinant de la rencontre entre un Orient et un Occident qui ne cessent de se tenter.
Istanbul : le conte des trois cités - Traduit de l'anglais (Grande-Bretagne) par Isabelle Taudière et Raymond Clarinard
Calmann-Lévy
Tirage: 8 000 ex.
Prix: 27,90 euros ; 800 p.
ISBN: 9782702163672