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La culture du partage

La culture du partage

Danièle Bourcier, responsable scientifique de Creative Commons France, estime, comme elle l’a soutenu aux dernières assises du numérique du SNE, que ces licences créent un nouvel équilibre entre auteur, éditeur et public.

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Créé le 15.11.2013 à 11h46

“Les licences Creative Commons sont nées en 2002 à la suite d’un cas juridique très significatif. Aux Etats-Unis, le Sonny Bono Act (1999) a été voté par le Congrès après un pressant lobbying. Cette loi, appelée aussi le Mickey Mouse Protection Act - car la Walt Disney Company risquait de perdre ses droits sur le personnage de Mickey -, prévoyait un prolongement de l’exploitation des droits d’auteur jusqu’à 70 ans après sa mort. Un mouvement de juristes, d’entrepreneurs du Web, de militants de la free culture, a réagi en portant ce texte devant la Cour suprême, mais le recours a confirmé le texte. De là sont nés les Creative Commons aux USA puis dans 75 Etats, dont la France.

L’idée est simple : à partir d’une plateforme Web, des licences en libre accès (et gratuites) permettent aux auteurs, qui veulent renoncer partiellement à leurs droits d’auteur, de le signaler à l’avance. Ils attachent l’une des six licences - de la plus ouverte à la plus restrictive - à leur œuvre. Dans un deuxième temps, ces œuvres (qui peuvent être recherchées sur un moteur de recherche à partir d’un logo CC), peuvent être réutilisées par d’autres utilisateurs aux conditions données par l’auteur. Sont concernés les écrits (livres, articles…), mais aussi la musique, les photos, la vidéo, les sites Web. Dès que l’œuvre peut être considérée comme protégée par le droit d’auteur, le créateur peut utiliser une de ces licences.

Intérêt de ces licences : elles sont gratuites, faciles à utiliser et à comprendre. Vous choisissez parmi quatre logos que vous pouvez combiner. Vous demandez que l’œuvre reste dans le domaine non marchand ou non (droit d’auteur classique), qu’elle ne soit pas modifiée, ou que, modifiée, elle soit restituée aux conditions initiales. Donc, soit la licence est libre (l’auteur abandonne un maximum de droits), soit elle est ouverte mais avec des conditions restrictives. Ce qui est essentiel, c’est que le logo CC soit clairement accessible pour chaque œuvre car le futur utilisateur pourra la réutiliser sans revenir à l’auteur. Ces licences sont légales et sûres car elles n’ont fait l’objet d’aucun contentieux !

Il n’existe pas de contradiction entre CC et le monde de l’édition. Les éditeurs commerciaux peuvent utiliser des œuvres sous CC pour la recherche de photos ou d’illustrations. Mais ils peuvent aussi publier les livres sous Creative Commons, si l’auteur le négocie. Le livre sera alors vendu mais pourra avoir une version PDF en ligne sous CC. L’auteur peut aussi mettre son ouvrage sous CC, en s’autopubliant ou en en confiant la publication à un éditeur, comme en musique sur le site Jamendo.

Tous les modèles d’innovation sont possibles : CC s’adresse aussi bien aux auteurs généreux ou astucieux qu’aux entrepreneurs qui ont compris que le numérique était une nouvelle chance à saisir. CC, c’est seulement la substitution de «Quelques droits réservés» à «Tous droits réservés». Un nouvel équilibre entre auteur, éditeur et public.”

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