Martin Richard est professeur d’informatique à l’Ecole des mines de Nantes, une école « jeune » (elle a été créée en 1990), qui a pour vocation de former des ingénieurs pour l’industrie, et pour ambition de proposer des méthodes d’enseignement innovantes s’appuyant notamment sur les nouvelles technologies. Et donc, Martin Richard a eu l’idée de transformer l’iPod, le baladeur vedette d’Apple, vendu à des millions d’exemplaires à travers le monde, en cartable électronique. Le test a eu lieu en janvier, auprès de neuf étudiants de troisième année à qui il avait été confié un baladeur du modèle iPod Touch. Pendant deux semaines, les élèves ont utilisé leur baladeur pour suivre un cours consacré à « la programmation des systèmes embarqués » (systèmes informatiques autonomes, comme on en trouve par exemple dans les satellites) dont le contenu a été adapté à une utilisation nomade. Pour l’essentiel, il consistait en des transparents commentés par la voix du professeur, qui avait également enregistré (en vidéo) une partie de son cours, dans laquelle il donnait une série d’exemples au tableau. Les élèves ont ainsi pu se former chez eux, mais aussi durant leur temps de transport. Puis, pendant les deux semaines suivantes, les élèves ont suivi des séances de travaux pratiques devant un ordinateur, leur permettant d’appliquer les connaissances acquises. Et ils disposaient sur leur iPod de documents de référence, tels que les formules de programmation les plus couramment utilisées. L’expérience qui a eu un bel écho médiatique (relayé par la presse informatique, bien sûr, mais aussi par le Monde et les Echos ), est en cours d’évaluation et les iPod ont été récupérés par l’école. Elle sera renouvelée l’an prochain pour le même cours et devrait s’étendre à trois ou quatre cours de dernière année. Et pourquoi pas, à d’autres disciplines que l’informatique. Elle ne concernera toutefois que des groupes limités d’élèves (pas plus de 15), l’école n’ayant pas les moyens de fournir des iPod à tout le monde (chaque année, 150 à 200 élèves intègrent les première année). Martin Richard, que j’ai contacté, se dit « flatté » de l’honneur qu’on lui fait de s’intéresser à son initiative, et en rajoute dans la modestie, assurant qu’il n’a rien d’un « grand pédagogue » : « Je ne suis qu'un enseignant ayant fait une expérimentation d'usage de la baladodiffusion, me dit-il. Bon, j'ai quand même une grande expérience des pédagogies alternatives et des dispositifs un peu innovants. Je fais depuis très longtemps de l'enseignement à distance à des adultes ou à des étudiants en Chine ou en Algérie. Mes préoccupations actuelles se focalisent autour des nouvelles façon d'apprendre où l’on mélange beaucoup les formes pédagogiques dans des dispositifs de plus en plus complexes. Par exemple, à l'École des Mines de Nantes nous expérimentons les pédagogies actives dans les premières années de l'école. Ces approches nous permettent de réduire, jusqu'à éliminer dans certains cours, les séances de cours magistraux au profit d'alternance de plusieurs formes pédagogiques comme l'auto-apprentissage assisté, les séances de mise en situation et l'apprentissage par problème. L'usage de la baladodifusion est un outil complémentaire intervenant dans un dispositif précis. » Et, en attente de l’évaluation définitive, il commente encore : « Il est difficile de conclure à la meilleure performance d'un tel dispositif qui remplaçait un cours magistral classique suivi des mêmes travaux pratiques. J'ai pu néanmoins observer quelques éléments intéressants. En particulier, j'ai trouvé que les élèves avaient assimilé plus tôt dans le dispositif certains contenus pédagogiques. Il fallait auparavant attendre le premier ou le second travail pratique pour que certains contenus soient bien assimilés. Dans le nouveau dispositif, j'ai pu vérifier lors de la séance de régulation que certains contenus avaient déjà été assimilés. Est-ce la seule baladodiffusion ? Est-ce l'aspect attrayant du nouveau dispositif qui a entraîné un investissement plus important des élèves ? Difficile encore là de répondre, mais il est certains et reconnu par les chercheurs en pédagogie qu'un apprenant assimile mieux un contenu lorsqu'il est acteur et pas seulement passif face à l'apprentissage. » J’ai invité Martin Richard à venir raconter de vive voix son expérience et les enseignements qu’il en tire lors d’une table ronde consacrée à la nouvelle diffusion des savoirs à l’ère numérique, qui aura lieu le mercredi 19 mars à 10h, au Salon du livre de Paris, dans le cadre de l’espace « Lectures de dem@in ». Six tables rondes « professionnelles » seront organisées dans cet espace durant le salon et parrainées par Livres Hebdo .
15.10 2013

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