Grands prix d'automne 2024

« Houris » de Kamel Daoud, un livre « qui honore le Goncourt »

Kamel Daoud, prix Goncourt 2024, aux côtés de Tahar Ben Jelloun, membre du jury - Photo Olivier Dion

« Houris » de Kamel Daoud, un livre « qui honore le Goncourt »

Sacré dès le premier tour de scrutin, Houris de Kamel Daoud (Gallimard) est largement salué en tant que lauréat du prix Goncourt 2024.

Par Elodie Carreira, Charles Knappek
Créé le 04.11.2024 à 14h18

Contrairement aux deux derniers vainqueurs du prix Goncourt – Jean-Baptiste Andrea pour Veiller sur elle (L’Iconoclaste) en 2023 et Brigitte Giraud pour Vivre vite (Flammarion) en 2022 –, le lauréat 2024 du plus prestigieux des prix littéraires français n’aura pas eu besoin de la double voix du président du jury pour trancher un scrutin serré.

C’est même l’inverse qui s’est produit, Kamel Daoud ayant obtenu la majorité absolue des votes dès le premier tour de scrutin pour son roman Houris (Gallimard). Il a devancé Archipels d’Hélène Gaudy (L’Olivier), qui a récolté deux suffrages. Jacaranda de Gaël Faye (Grasset), entre temps récompensé du prix Renaudot, et Madelaine avant l’aube de Sandrine Collette (JC Lattès), n’ont quant à eux obtenu qu’une voix chacun.

Kamel Daoud était largement donné favori par la presse littéraire, d’aucuns voyant dans Houris un « Goncourt politique », comme l’anticipait la journaliste de France Inter Ilana Moryoussef, interrogée la semaine dernière.

« Ce livre est né parce que je suis en France. C'est un pays qui me donne la liberté d'écrire »

Originaire d’Oran, Kamel Daoud a choisi de vivre en France, trois ans après avoir reçu la nationalité française. En Algérie, il a subi des menaces, son roman ayant transgressé un article de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, qui interdit d’évoquer la guerre civile qui ravagea le pays entre 1992 et 2002 et qui fit entre 60 000 et 200 000 morts, ainsi que des milliers de disparus.

« Ce livre est né parce que je suis en France. C'est un pays qui me donne la liberté d'écrire. Ce n'est pas facile de parler de guerre, il faut du temps, du deuil, de la distance. C'est un livre qui va dans le sens de l'espoir », a réagi l’écrivain, après avoir un fait un tour de table pour remercier les jurés.

« Il y a des livres qui sont honorés par le Goncourt et des livres qui honorent le Goncourt. Celui-ci était un peu une évidence et mon grand coup de cœur », a, pour sa part, commenté l’autre membre du jury Éric-Emmanuel Schmitt.

Ancien président du jury Goncourt, où il est resté en poste pendant trois ans, Didier Decoin, qui a retrouvé son fauteuil de simple juré, signale pour sa part « un très très bon livre. » « La première chose, c'est la prise de conscience d'événements graves qui se sont passés en Algérie, que les responsables ont voulu mettre sous le tapis et que Kamel Daoud a ressortis, a-t-il complété. C’est aussi la place qu’il donne aux femmes, à leur souffrance et par-dessus tout, à la poésie arabe, comme la musique de Shéhérazade que l’on entend tout au long du livre et qui m’a enchanté. »

Antoine Gallimard, président du groupe Madrigall, s'est pour sa part félicité de la victoire de Kamel Daoud auprès de Livres Hebdo : « C'est assez rare d'avoir un livre couronné qui est à la fois un livre d'une grande qualité littéraire et en même temps qui est un formidable message politique. Nous sommes donc extrêmement heureux. »

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