Spécialistes de Flaubert, Pierre-Marc de Biasi est aussi féru de nouvelles technologies. Dans cet essai, il examine le cas de notre téléphone à tout faire, le smartphone, qui nous libère autant qu'il nous soumet. Après le premier (la tête) et le deuxième (le ventre), il constituerait notre troisième cerveau. Il est vrai que nous lui confions tout, au point de le laisser modifier notre conception du monde. Notre mémoire individuelle et collective se trouve désormais dans ce petit rectangle.

Pour cette « enquête phénoménologique et médiologique », il a aussi interrogé les usagers qui ne peuvent se passer de ce couteau suisse existentiel. Cette « machine doudou » nous renseigne sur tout en échange d'un assujettissement au système global de surveillance.

Cet expert en génétique des textes ne prend pas le ton du pamphlet contre, bien que les exemples qu'il donne soient inquiétants. Il veut avertir des dangers de cette expropriation progressive de l'esprit par cet esclave numérique à qui nous obéissons. Car ce « troisième cerveau » nous rend-il plus intelligent ? Quand on apprend que 30 % des Sud-Coréens avouent préférer se passer de vie sexuelle plutôt que de leur smartphone, ce n'est pas sûr.