En Haïti, l'écrivain se doit de faire partie de la vie sociale

Lyonel Trouillot

En Haïti, l'écrivain se doit de faire partie de la vie sociale

Lyonel Trouillot, finaliste du Goncourt avec La belle amour humaine (Actes Sud) et directeur festival Etonnants Voyageurs en Haïti prône un « activisme culturel orienté socialement ».

Par Anne-Laure Walter
avec alw, d'haïti Créé le 15.04.2015 à 20h04

Lors de la deuxième journée du festival Etonnants Voyageurs, jeudi 2 février 2012, les écrivains ont fait le tour des écoles de Port-au-Prince après avoir rencontré les élèves dans les provinces.

Des rencontres avec la population que les écrivains haïtiens se font un devoir de multiplier. Et dans un pays encore en ruine deux ans après le séisme qui l'a ravagé, les soirées poésie, ateliers d'écritures et débats publics ont repris de plus belle.

Lyonel Trouillot, qui dirige l'édition haïtienne d'Etonnants voyageurs explique « qu'avoir ce festival, dans un pays livré aux ONG et sans institutions, cela permet de retrouver du sens, par rapport au réel. »

Avec cette liberté de ton qui lui est propre, l'auteur de La belle amour humaine (Actes Sud) déplore la facilité de la formule : « la culture est ce qui sauvera Haïti ». Il ajoute : « Pour l'instant la culture est en train de sauver une poignée d'écrivains haïtiens qui participent à Etonnants Voyageurs. Il serait bien qu'elle commence à sauver les autres. »

La nécessité pour l'écrivain de pratiquer un « activisme culturel orienté socialement »

Et en Haïti l'expression galvaudée « écrivain engagé » fait sens. Le renforcement de la présence des ONG suite au tremblement de terre a entraîné une forte ségrégation avec le développement de lieux, cafés, restaurants réservés aux riches expatriés. Or la culture fait souvent partie de ses privilèges sociaux.

Ce qui explique, selon Lyonel Trouillot, la nécessité pour l'écrivain de pratiquer un « activisme culturel orienté socialement » à l'image des « dimanche poésie » que propose Bonel Auguste, auteur et bibliothécaire et réunissent 200 jeunes du quartier populaire de Carrefour.

D'ailleurs Jean-Euphèle Miclé, auteur des Jardins naissent (Les 400 coups, 2011) qui s'était rendu la veille aux Gonaïves, la ville où il a grandi, expliquait aux lycéens le rôle de l'écrivain dans la cité. « On doit le croiser dans la ville. Il se doit d'animer des ateliers d'écriture, de fréquenter les bars, d'intervenir à l'alliance française de dédicacer ses livres. Il a une forme de compagnonnage en littérature. »

Dans ce sens, en août 2011, Lyonel Trouillot et sa soeur Evelyne ont officiellement ouvert le centre culturel Anne-Marie Morisset, du nom de leur mère, dans le quartier de Delmas. Le centre propose une bibliothèque qui contiendra prochainement les 5 000 livres acquis, mais aussi des cours d'arts martiaux, des appuis à la formation scolaire, un service d'écrivain public, ce qui est nécessaire dans un pays dont plus de la moitié de la population est analphabète.

15.04 2015

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