Cogito ergo seum. Lorsqu'elle travaillait dans l'édition, Chams Zarrouk a croisé des penseurs à la peine et des chercheuses déprimées. Elle s'est demandé d'où venait leur « seum » - en argot, le dégoût, la rage. « Petite meuf qui ne veut pas trop souffrir et se marrer le plus possible », elle affirme dans son premier livre, chez le nouvel éditeur Les Corps Conducteurs, son besoin de dérision dans un monde risible. « Rigoureuse, sérieuse, documentée, d'un côté, concrète, légère et rigolote, de l'autre », elle chemine dans cette existence moderne, entre l'injonction du trop ceci ou cela et l'oubli du pas assez de vie justement. « J'y construis mon raisonnement en articulant des récits de rendez-vous galants foireux avec des textes de philosophes et de sociologues. » Le résultat se déguste. Une écriture, une démarche modeste et ambitieuse à la fois, lucide dans son approche mais qui recherche le positif à tirer du négatif. Ce n'est pas nouveau, mais cela est fait ici avec simplicité, sans bla-bla ni chichi philosophique, pour reprendre l'expression de Frédéric Schiffter. Passée par Normale Sup, ancienne attachée de presse chez Perrin, Chams Zarrouk aime Paris, les produits de la mer et les questions existentielles. Entre embouteillages et crustacés, elle s'est donc lancée dans cet essai si bien nommé Le goût du seum, construit comme un manuel d'antidéveloppement personnel avec du Deleuze et du Barthes dedans. Elle nous dit qu'il faut apprendre à vivre avec sa mauvaise humeur, la transformer en humour, rester cool en ayant le seum.
Homère a montré l'effet complexe de la colère d'Achille sur la guerre de Troie. Mais c'est grâce à elle que nous nous indignons et nous engageons. Et il y a de quoi avoir le seum aujourd'hui ! Pour Chams Zarrouk, ce n'est pas la marque des personnalités pénibles, mais une réaction à l'« effet labrador », cette gentillesse vendue par les marchands de sommeil intellectuel. Notre « seumologue » revendique le droit à aller mal, le droit à l'humilité. C'est lui qui nous met en mouvement contre l'industrie du bien-être. Avec humour, elle nous dit je pense donc je suis vénère, ce que nous pourrions traduire dans l'esprit cartésien par cogito ergo seum.
Le goût du seum. Vivre haut nos frustrations
Les Corps Conducteurs
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 16 € ; 160 p.
ISBN: 9782488557054
