Les intervenants du projet de numérisation des indisponibles du XXe siècle manifestent toujours la même volonté de voir aboutir le projet, mais tous reconnaissent qu'il est "très complexe". Début septembre, le bureau du Syndicat national de l'édition s'est réuni pour examiner les hypothèses de marché présentées par le cabinet PMP, chargé de l'étude préalable au lancement. A la mi-juillet, un rapport d'étape indiquait que le marché individuel pourrait être plus porteur que les licences d'accès vendues aux bibliothèques et centres de recherche. Les éditeurs aussi s'interrogent sur le rôle de la plateforme où ces contenus numériques seraient stockés, certains la souhaitant limitée à une prestation technique tandis que d'autres envisagent qu'elle puisse intervenir dans la commercialisation.
Officialisé par un protocole d'accord signé le 1er février entre pouvoirs publics, éditeurs et auteurs, ce projet prévoit de numériser 500 000 titres publiés au XXe siècle, mais introuvables en librairies et non numérisables sans l'accord des ayants droit, en l'état actuel du Code de la propriété intellectuelle (CPI). Il faudrait modifier la loi pour autoriser cette numérisation sans accord préalable et explicite des ayants droit, mais en leur laissant la possibilité de récupérer l'exploitation de l'oeuvre, ce qui revient à une version française de l'opt-out proposé par Google.
Devenu le spécialiste du livre à l'Assemblée nationale, le député Hervé Gaymard pourrait se charger de porter cette proposition, mais il attend que les professionnels se mettent d'accord. Et dans un calendrier parlementaire disputé par tous ceux qui veulent faire passer leur réforme avant l'élection présidentielle, les créneaux disponibles deviennent rares. Au bureau de la commission culture, on ne voit guère que la fin novembre, après la première discussion budgétaire. Et il faudrait que la loi soit assortie d'une procédure accélérée, avec un accord immédiat de l'Assemblée et du Sénat, pour être votée avant la fin de l'année.
A la recherche d'un accord
Le ministère veut avancer sur ce dossier en chantier depuis que Google l'a ouvert à sa façon, en numérisant des millions d'ouvrages sans autorisation. Et il presse les éditeurs et les auteurs de s'entendre, d'une part, en assurant un financement via le programme des investissements d'avenir et, d'autre part, en utilisant la menace des initiatives de la Commission européenne, qui prépare une directive sur les oeuvres orphelines, dont les ayants droit sont inconnus. Si le CPI est adapté à la numérisation des indisponibles, il couvrira naturellement le cas des oeuvres orphelines et la France n'aurait plus besoin de modifier sa législation dans un cadre tracé par Bruxelles.