Mafia de la fashion. On sait ce qu'est une fashion victim - quelqu'un qui suit aveuglément les diktats de la mode. Mais la cécité dont nous autres consommateurs sommes frappés est engendrée bien plus par notre boulimie vestimentaire que par notre désir mimétique en matière de style. Quant à être victime, notre absence de prise de conscience nous empêche trop souvent de nous rappeler qui dans l'affaire sont les victimes. Abus, maltraitance, viol, prostitution, malnutrition... Dans L'odyssée d'Abdoul, Audrey Millet nous montre à travers une écriture incarnée les conditions de vie atroces des soutiers de la confection. Proies des mafias tout au long de leur périple, ces migrants, arrivés en Europe, sont derechef exploités par une industrie textile trop heureuse d'avoir une main-d'œuvre bon marché et sans aucun droit.
Cette « enquête sur le crime organisé » de la traite des corvéables de la mode retrace l'itinéraire d'un jeune tailleur ivoirien. Comme tant d'autres en Afrique subsaharienne, Abdoul veut s'établir avec son propre atelier. Au pays, nulle perspective, même s'il a déjà échappé à un destin de travailleur agricole en apprenant son métier à la ville. Commence sa longue traversée... Abidjan, Niamey, le désert libyen, Lampedusa, Palerme, Caserte, Prato... 6 200 kilomètres ! Débute également l'exil des rêves d'Abdoul et d'autres migrants venus du Pakistan, du Bangladesh... Prato est la plaque tournante du faux « made in Italy » qui masque la fast fashion fabriquée en Chine. 4 € la robe, c'est sûr, pas cher ! Pas chère non plus la vie de femmes et d'hommes morts d'épuisement ou noyés en mer.
L'odyssée d'Abdoul. Enquête sur le crime organisé
Les Pérégrines
Tirage: 3 200 ex.
Prix: 20 € ; 272 p.
ISBN: 9791025206348