Trafiquer dans l'infini est placé sous le haut patronage de Rimbaud, dont André Velter, Ardennais lui-même, est un grand fan. Dans ce nouveau recueil, dont le titre provient d'ailleurs d'une lettre de Rimbaud de Harar le 4 mai 1881, Velter passe en revue ses thèmes d'inspiration favoris, la beauté, le voyage malgré tout, la poésie par-dessus tout, comme une bonne chanson, la bande passante d'une vie. Avec quelques dégagements concernant le monde actuel : une défense de la corrida, ou un constat accablé : « À huit milliards et plus / L'espèce est au bout du rouleau / Sur une terre qui n'en peut plus. »
Velter profite surtout de l'occasion pour composer une espèce de guirlande comme on faisait à la Renaissance (sa période de prédilection), rassemblant tous ses auteurs fétiches : Segalen, Baudelaire, Éluard, Satprem, Omar Khayyam, François Cheng (Velter cultive depuis toujours un fort tropisme asiatique), Jaufré Rudel, le troubadour de Blaye parti mourir par amour à Tripoli (au Liban actuel), ou encore le mystérieux Maurice Scève, qui retrouva, en 1533, le tombeau de la Laure de Pétrarque, avec, dit-on, un sonnet inédit du maître italien. Se non è vero...
Tout cela est érudit, certes, riche en références, mais jamais pédant ni abscons. André Velter, qui a dirigé la collection « Poésie »/Gallimard durant des années et a popularisé la poésie à la radio ou dans des récitals musicaux, est un passeur de poésie. Il écrit dans une langue simple, voire parlée, qui ramène le genre à ses origines, orales. Du coup, trafiquer dans cet infini, s'y égarer, devient un plaisir.
Trafiquer dans l'infini
Gallimard
Tirage: 2 000 ex.
Prix: 15 € ; 136 p.
ISBN: 9782073013101