A l'aube d'un possible rapprochement entre Hachette Livre et Editis au sein de Vivendi, la romancière Virginie Grimaldi a annoncé, le 14 juin au soir, son départ de la Fayard, l’une des filiales d’Hachette. "J'ai passé sept années formidables, entourée et portée par des personnes extraordinaires, tant sur le plan humain, que sur le plan professionnel, mais mes valeurs et mes convictions ne sont plus en phase avec la direction que prend la maison", affirme l'écrivaine sur Twitter.
Virginie Grimaldi est une habituée des meilleures ventes avec ses romans Il nous restera ça, Les Possibles, Quand nos souvenirs viendront danser, Le premier jour du reste de ma vie, traduits dans une vingtaine de langues. En 2021, elle était même la deuxième romancière la plus lue dans l'Hexagone avec 877 000 exemplaires vendus selon les estimations GfK/Livres Hebdo (calculées en cumulant les ventes grand format et poche).
— Virginie Grimaldi (@GinieGrimaldi) June 14, 2022
Un climat d'incertitude
Le départ de la romancière intervient immédiatement après l'annonce de la nomination d'Isabelle Saporta à la tête de Fayard. L'ancienne journaliste d'investigation devrait prendre ses fonctions en fin de semaine. Jusqu'ici directrice littéraire, celle qui se qualifie elle-même de "poujado de gauche" a notamment publié l’économiste Thomas Porcher, le chercheur François Gemenne, la politologue Chloé Morin, l’éditorialiste Maxime Lledo, mais aussi Christophe Barbier et Cyril Hanouna, ou encore l'écrivain Vincent Ravalec. Isabelle Saporta succède à Sophie de Closets dont le départ avait été annoncé le 24 mars par Hachette Livre. Après dix-huit ans au sein de cette maison littéraire, l'éditrice a quitté le groupe à la suite de pressions exercées sur elles par l'ancien président Nicolas Sarkozy, lui-même administrateur de Lagardère et promoteur d’une fusion Hachette-Editis, selon une enquête du Monde.
D'après un autre article publié par Le Monde le 13 juin, Nicolas Sarkozy aurait reçu, peu après la publication de notre grand entretien avec l'ancien président de la République, un SMS d'Isabelle Saporta le félicitant de la qualité de cet entretien et lui demandant une entrevue. « On verra si elle peut faire une bonne PDG de Fayard », aurait déclaré l'ancien président, toujours d'après Le Monde.
Un long feuilleton politico-financier
Les changements chez Fayard constituent les nouveaux épisodes du long feuilleton politico-financier ouvert il y a un an par la perspective d’un rapprochement entre les deux leaders de l'édition française au sein de Vivendi. Si le départ de Virginie Grimaldi des éditions Fayard reste pour l’instant isolé, il pourrait ouvrir une nouvelle saison de mercato des auteurs, dont beaucoup attendent de connaître les modalités du rachat de Lagardère par Vivendi.
Depuis mardi 14 juin et à la suite de l'OPA lancé en février, le groupe Vivendi de Vincent Bolloré détient désormais 57,35% du capital du groupe Lagardère, ainsi que 47,33% des droits de vote théoriques. Beaucoup d'auteurs, mais aussi des éditeurs et libraires, craignent de voir une situation de monopole s'installer sur le marché de l'édition française.
Vivendi et Vincent Bolloré, s'ils sont désormais majoritaire au capital de Lagardère, ne pourront cependant exercer leurs pouvoirs qu'après l'approbation de l'opération par les autorités de la concurrence, notamment la Commission européenne, qui imposera sans doute des "remèdes" pour valider le mariage entre Editis et Hachette. Pour l'instant toutefois, celle-ci n'a pas encore été officiellement notifiée d'un projet de fusion entre les deux géants de l'édition française.